Newsletter du Lundi
11/12/23

Paru dans la newsletter du

Et si la régulation des plateformes était vaine ?

Qui ?
Professeur de data sciences à l'Université de Virginie.

Quoi ? 
Une tribune publiée dans Wired sur l'échec de la régulation de Facebook ou de Google, et sur des pistes d'avenir. tellement complète et pertinente que nous vous l'avons traduite.  Un texte à lire en particulier cet été alors que l'Autorité de la Concurrence s'apprête à condamner encore Google (voir revue de web) et que les recours juridiques pleuvent dans le monde.

Comment ?
Et si rien ne marchait ? et si après des années de recherche universitaires et d’enquêtes journalistiques, exposant  dominanceabrogationsduplicité arrogance, et incompetence de Facebook, aucun des outils de régulation ne marchait ?

Le 29 juin dernier, la Court fédérale a écarté  le recours de l’Etat et des Etats Unis contre Facebook (viol des lois antitrust).   Le gouvernement n’a pas convaincu la Court des raisons de poursuivre Facebook maintenant. En effet, le juge a souligné que le gouvernement américain n’a pas soulevé d’objection en 2012 quand Facebook a racheté Instagram. Ou en 2014, pour Whatsapp. Alors, pourquoi soulever des objections maintenant ? Le juge n’a pas tort, mais c’est nous qui avons eu tort en laissant rétrécir   nos défenses face au pouvoir des entreprises, depuis 40 ans.

Dans les heures qui ont suivi cette decision de justice, le cours boursier de Facebook s’est accru au dessus d’1 trillion de $. Facebook a rejoint le club Microsoft, Amazon, Apple et Alphabet. Ce cap a été atteint en 17 ans. Un record. Approchant les trois milliards d’utilisateurs dans le monde, rien ne peut arreter Facebook dans sa course, au moins à court terme.

Rien dans l’histoire de l’humanité, à l’exception de Google,  n’a atteint 3 milliards de personnes, parlant 100 langues différentes. Le pouvoir de Facebook est lié à cette échelle et à notre dépendance à Facebook, Instagram et Whatsapp pour nos interactions sociales er nos identités virtuelles.

Alors que ces produits sont mauvais pour la   démocracie ils sont aussi utiles et populaires.  . Facebook est terrible dans son agrégation, mais sert individuellement ses utilisateurs suffisamment bien que la grande majorité ne devrait pas quitter ces domaines. Le gouvernement US, chargé de nous protéger de nos mauvaises habitudes, n’a pas les bons outils pour controler les dommages occasionnés par facebook et Google.

Alors, que pouvons-nous faire, en tant que citoyens ? Que devons nous exiger de nos gouvernements ?

Il y a trois domaines de régulation gouvernementale : l’anti-trust, la régulation des contenus, et les droits concernant la donnée.
Les artisans du changement se sont concentrés sur les deux premières. Même si elles doivent être poursuivies, elles ne résoudront pas nos problèmes.

 L’anti-trust a monopolisé l’attention récemment mais il serait vain d’espérer. Les républicains ont passé les quarante dernières années à affaiblir la regulation anti trust, au profit des entreprises.  Penser que les lois antitrust puissant changer le comportement de Facebook son design, ou même compromettre sa croissance serait faire prevue d’une grande naiveté. Même dans des marches hautement compétitifs, comme la distribution, les grandes sociétés restent grandes. Et grandes sociétés, comme petites , polluent, font de l’évasion fiscale, exploitent et maltraitent le travail, et distraient les gens de leurs devoirs civiques et familiaux Les lois antitrust sont au mieux un tout petit souci pour ces big companies.

La régulation des contenus est encore plus inefficace et brumeuse. Bien des pays interdisent Google et d’autres éditeurs de publier des contenus que les gouvernements considèrent comme nuisibles. En dépit du discours touchant de Zuck  sur la liberté d’expression, lui et sa société n’ont jamais compris ce que cela  signifie—or even understood—what it means.

Facebook a été conçu pour des êtres humains qui ne haîssent pas, qui n’exploitent pas, qui ne font pas de harcèlement. Bref, qui ressembleraient tous à un golden retriever.

Bien sur, une censure semblable n’est pas à l’agenda des Etats Unis, du Canada ou d’autres pays à la longue tradition libérale.La regulation du contenu aux Etats Unis serait de render Facebook et les autres plateformes responsables du contenu posté par leurs utilisateurs.  A l’opposé de l’immunité actuelle apportée par  la  Section 230 du Communications Decency Act

Malgré un flot de commentaires récents, réformer la  Section 230, ne rendrait pas Facebook meilleur pour ses utilisateurs. Certains pays ont des réglemenattios qui protègent les plateformes sur ce sujet, mais jamais aussi loin que la section 230. Et pourtant, les plateformes continuent dans ces pays leur course folle. Ainsi, en Inde la réglementation sur la responsabilité / contenu a changé, mais Facebook ne donne aucun signe d’abandonner son plus grand marché et celui qui progresse le plus rapidement .

L’idée de la réglementation US est qu’elle encouragerait les plateformes à s’autoréguler.  Mais cela ne s’est pas passé de la sorte. Facebook et Google essaient faiblement et sporadiquement de réguler le contenu sur leurs plate-forme. Mais leur échelle les en empêche.

Peut-être direz-vous que de rapetisser ces sociétés aiderait.
Et c’est frappé du bon sens. Des sociétés comme Reddit, qui n’a que 430 M d’utilisateurs se débrouillent bien mieux sur la régulation de leurs contenus- au moins depuis 2020, quand elle a renoncé à sa doctrine sur la liberté d’expression et a encouragé des techniques de modération communautaires très  Mais il est trop tard pour contrer le reach de Facebook.

Contrairement à la plupart des autres sociétés, la croissance et l’engagement utilisateur et non le revenu, le profit, ou la capitalisation boursière, ont été les metrics clés.

Vouloir limiter le reach de facebook entrerait en collision avec ces valeurs centrales. Mais aujourd’hui, nous n’avons pas de méthode pour le faire.

Si toutes les formes de régulation ont échoué, certains pensent que cette société va  s’autoréguler avec  Facebook Oversight Board. Mais ces dirigeants de la société civile, tous sincèrement determinés à améliorer Facebook, sont dans l’incapacité de résoudre ses problemes fondamentaux. Le board statue sur les comptes à enlever ou maintenir, comme si c’était cela qui posait problème à  la démocratie et les droits de l'homme dans le monde. Le board ne s’occupe pas des algos qui amplifient le contenu. Ni les biais liinguisiques, ni l’organisation interne. Il ne questionne pas le focus sur la croissance et l’engagement. Il n’’est pas concerné par  l'AI  ou la  VR. Plus nous prenons au séreux l’oversight comitee, moins nous prenons au sérieux Facebook. Le board est inutile et l’”autoregulation, un oxymoron. Pourtant, beaucoup d’esprits brillants continuent à le prendre au sérieux, permettant à facebook de structurer le débat autour de cela. Et d’éviter toute mise en cause de sa responsabilité.

Qu'en est-il de nous ? Nous sommes après tout 3 milliards à pouvoir agir.
Et si chaque utilisateur de Facebook décidait d’être une meilleure personne, de mieux réflécir, d’être plus gentil plus patient et tolérant ? Nous travaillons depuis 2 000 ans à améliorer l’humanité et ca ne se passe pas si bien. Même avec de la formation au média il n’y aura pas beaucoup d’amélioration. En particulier quand Facebook exploite nos tendances à favoriser nos expressions extremes et émotionnelles.  Facebook a été conçu pour des animaux meilleurs que les humains, qui ne se détestent pas ne s’exploitent pas les uns les autres.

Mais nous sommes des bêtes malfaisantes. Nous devons donc concevoir nos technologies pour corriger nos points faibles. .

Voici comment :

Nous devons d’abord reconnaitre que la menace de Facebook ne réside pas dans des aspects marginaux de ses produits, ou dans la nature du contenu distribué. Mais dans  la surveillance généralisée que Facebook exploite pour cibler les publictés et les contenus. Et dans ses valeurs fondamentales: un focus sur la croissance ininterrompue et l'engagement, dont la surveillance généralisée est le fuel.

Et surtout, dans l’effet délétère de Facebook, qui nous empêche de penser collectivement.  Nous ne pouvons organiser un mouvement politique autour de la façon dont Trump a exploité Facebook en 2016, ou de la façon dont il en a été expulsé en 2021. Ou sur la façon dont Facebook a contribué directement à l’expulsion massive et au meurtre des Rohingya de Myanmar. Nous ne pouvons rallier des gens sur la façon dont Facebook domine le marché publicitaire dans le monde. Nous ne pouvons expliquer les nuances de la section 230 et attendre un consensus sur le sujet. Rien de cela ne suffit.

Le problème de Facebook, c’est Facebook.

Facebook est dangereux à cause de l’impact collectif de 3 milliards de personnes surveillées en permanence. Et qui ont leurs connections sociales, les stimulations culturelles, leur conscience politique forgés par des algos prédictifs tordus pour avoir toujours davantage d’engagement.

Le probleme n’est pas la popopularité d’un president dsur Facebook dans un endroit du monde, le probleme c’est Facebook lui même.  Facebook sera probablement aussi puissant ou encore plus puissant qu’aujourd’hui, pour des décennies. Alors, en même temps que nous devons nous efforcer de mieux vivre avec, il faut passer les prochaines années à réfléchir à une réforme radicale. Il faut s’attaquer aux racines de Facebook, et pendant qu’on y est, de google.

Une récente intervention réglementaire pourrait servir de première étape.

En 2018, l’Union Européenne a insisté pour que les entreprises qui collectent les données respectent les droits basiques des citoyens. Le GDPR accorde aux utilisateurs de l’autonomie sur la data qu’ils génèrent et sur la transparence dans la façon dont la data est utilisée.
Le respect de cette régulation a été rock and roll et le signe de son entrée en vigueur, une myriade de formulaires pour accepter les termes. Mais la loi offre la possibilité de limiter le pouvoir des aspitareurs à big data que sont Google et Facebook. Elle doit être étudiée, renforcée et généralisée dans le monde. Si le Congrès américain les parlements du Canada, d’Australie et d’Inde prenaient au sérieux les droits des citoyens concernant leur data , il y aurait un certain espoir.

Au dela du GDPR, il faudrait empêcher Facebook ou toute autre entreprise de traquer tout ce que nous disons et faisons et limiter leur utilisation de la data pour influencer nos connections sociales et nos activités politiques. Nous pouvons limiter le pouvoir et le reach de FB sans compromettre la liberté d’expression. Nous pourrions rendre Facebook moins important.

Imaginez que nous gardions notre focus sur la manière dont fonctionne Facebook et des raisons pour lesquelles cette société est si riche et puissante. Si nous faisons cela au lieu de nous concentrer sur le dernier exemple de fake news sur la plateforme, nous aurons peut etre une petite chance. Comme Marshall McLuhan nous l’a enseigné il y a 56 ans, c’est le medium qui compte pas le message.

 

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