Qui ?
Xavier Sarron, head of multiscreen Dentsu France.
Quoi ?
L'offre pub de Netflix (qui compte 10 millions d'abonnés en France) lancée le 3 novembre, commentée par ce dirigeant d'agence média.
Que penser de ce lancement ?
C'est un événement majeur mais lancé à la hâte, dans 12 pays en simultané, ce qui explique aussi pas mal les péripéties engendrées par ce lancement. Par exemple, en France, la plateforme a dû se plier à la loi Sapin, et elle a également dû s'adapter à chaque particularisme local de chaque pays. D’un autre côté, les annonceurs sont attirés par l'aspect inédit, qui leur garantit un bon rayonnement média mais aussi parce que l'offre peut les aider à toucher un public jeune, faible consommateur de télévision. Par ailleurs, ils se réjouissent de l'arrivée d'une nouvelle offre car la durée d’écoute baisse, alors que la demande de pub TV est en hausse.
En même temps, savoir quel public va toucher Netflix, c'est la question à 5,99€...
Effectivement, on ne sait pas quel public va être attiré, d'autant plus que la semaine dernière, les nouveaux abonnés qui se connectaient n’étaient aucunement incité à prendre l'offre avec publicité. La plateforme lance son offre en catimini, sans grande campagne de publicité et sans pousser les nouveaux arrivants sur cette nouvelle offre . C'est le paradoxe d'un produit publicitaire très cher, qui vise un public encore inconnu, mais les tarifs devraient se tasser avec la concurrence de Disney Plus. De plus, Netflix n'a pas encore révélé ce qu'elle peut faire en ciblage . La plateforme devra à la fois baisser ses prix et proposer de nouveaux ciblages pour continuer d'alimenter l'intérêt du marché.
Netflix ne trahit-il pas sa promesse ?
A partir du moment où le client a le choix, il me semble que non. En revanche, Disney semble vouloir convertir toute son audience à la version avec pub, ce qui est plus problématique. Cependant, tout ceci n'est qu'une rumeur et sera susceptible d'évoluer, en fonction des résultats de l'expérimentation en cours.
Le prix est-il le même partout ?
Non mais il est cependant important de noter que les volumes investis sont différents entre pays. En France par exemple, ils sont beaucoup moins importants qu’aux Etats-Unis, où Netflix a une position de marché très importante.
Il semble que l’offre de lancement ait rencontré un grand succès, malgré son prix ?
Effectivement, Netflix a estimé le nombre d’impressions et a déclaré avoir suffisamment d'annonceurs à date. Même il s'agit d’une manifestation d'intérêt, les annonceurs peuvent se désister sans payer de frais si le démarrage ne se passe pas comme ils l'espéraient.
Pas de mesure non plus ?
Pour comparer les campagnes sur la plateforme et en TV, il faudrait pouvoir mesurer les mêmes données. A date, Netflix est seulement en mesure de fournir un bilan du nombre d'impressions, du taux de complétion (vidéos vues à 100 %) et du device qui a servi à la diffusion (téléviseur, téléphone, ordinateur).
Question formats aussi, Netflix casse les codes...
Effectivement, demander des formats de 15 ou 30 secondes est très exigeant, car le marché diffuse en majorité des vidéos de 20 secondes en télé. En termes d'encombrement, Netflix prévoit 2 minutes de pub pour 40 minutes de programme, avec des écrans de 75 secondes maximum, soit 5 annonceurs maximum par écran, au début ou en milieu du programme (pré-roll et mid-roll), quand une chaine classique peut diffuser des écrans de plus de 6 minutes.
Autre originalité du lancement : l'absence de régie et de contact humain
C'est effectivement une révolution dans un secteur très dominé par les contacts adhoc. En France, Netflix a fait le choix de ne pas avoir de régie et passe par le trading desk Xandr (racheté cet été par Microsoft). Les agences n'ont donc aucun contact avec Netflix avant d'acheter les espaces publicitaires. Xandr nous a simplement informés des conditions commerciales. C'est un bouleversement dans les us et coutumes de notre milieu, un grand changement qui pourrait en augurer d'autres... Même si chez dentsu, 70% de la vidéo est achetée en programmatique, le marché de la télé classique est encore dans une logique d'engagement d'investissement annuel. Pour digitaliser la télé linéaire, il faudrait que les brokers télé vendent leur espace en tarif net. Et nous sommes encore loin d’y arriver !