Newsletter du Lundi
11/12/23

Paru le

Les 5 tendances du Midem 2015

Qui ?
Ryan Leslie (en photo), rappeur et PDG de Disruptive Multimedia, Alexander Ljung, PDG de Soundcloud, Hans-Holger Albrecht, PDG de Deezer et Brady Forrest, Vice-Président de Highway1.

Quoi ?
Les 5 tendances du MIDEM, rendez-vous annuel qui rassemblait 3000 professionnels de l’industrie de la musique à Cannes.

Comment ?

1/ Les artistes veulent reprendre le pouvoir

Le rappeur Ryan Leslie, dents en or et lunettes de soleil en toute circonstance, a dénoncé tous ceux qui - sous couvert de mettre des outils à disposition des artistes - les privent des données de leurs fans et des transactions relatives aux achats de disques ou de concert. L'accès direct à son audience grâce aux réseaux sociaux est un leurre, "je peux tweeter 8 fois dans la même journée les infos sur mon prochain concert, j'aurai toujours des fans le lendemain pour me dire qu'ils n'étaient pas au courant."

Ce rappeur-entrepreneur, diplômé d'Harvard, a donc exhorté tous les artistes à opter pour le marketing direct. "Donnez votre numéro de téléphone à vos fans, ils vous donneront le leur. Tirez un maximum de bénéfices des plateformes sociales à disposition, mais gardez la main sur la relation avec votre audience. Si vous avez peu de fans, vous avez tout intérêt à les chouchouter. Si vous en avez beaucoup, reprenez-le contrôle."

Conçu pour un usage personnel, son "super carnet d'adresse", boosté à l'intelligence artificielle, est désormais commercialisé par sa start-up Disruptive MultiMedia. A la première interaction, le service renvoie un message au fan lui demandant de remplir un court formulaire avec ses informations. La première pierre du CRM de l'artiste, auquel les informations sur les transactions effectuées via Gumroad viennent s'ajouter. "Un fan qui sait que l'artiste sait qu'il a acheté un album achète plus. Je remercie toujours mes fans par texto". Aujourd'hui le numéro de Ryan Leslie, le +19156006978, est affiché sur toutes ses pages sociales et l'artiste vante des taux de conversion allant jusqu'à 50%.

Le parallèle entre les start-up et les artistes est frappant. D'ailleurs, cette année le programme de découverte musicale sponsorisé par Pepsi et Deezer s'appelait l'"Artist Accelerator". Grands ou petits, les artistes s'emparent des médias sociaux et des plateformes de collaboration ou de distribution directe pour reprendre la main sur leur promotion, voire sur la distribution de leurs albums et tickets de concert grâce à Gumroad. Dans une toute autre dimension entrepreneuriale, Jay-Z a de son côté racheté Tidal, un service de streaming haute définition suédois, avec un succès mitigé. Particularité : il a invité d'autres artistes à prendre des parts dans la société.

2/ Le streaming, espoir de toute l'industrie, mais pas le seul

L'industrie de la musique s'est réduite de moitié en 10 ans. 15 milliards de dollars se sont évaporés avec le digital, la crise et les nouveaux usages. Voilà pourquoi le mot "monétisation" était dans toutes les bouches et les annonces d’Apple dans tous les esprits. Les plateformes de musique en ligne et les acteurs du streaming ont occupé le devant de la scène avec des débats autour des solutions pour augmenter les revenus provenant du digital et pour mieux les partager avec les auteurs-compositeurs et les artistes.

La croissance du streaming, de 192% d'ici 2019 selon un rapport MIDiA Research, fait renaître les espoirs. Apple et sa machine de guerre marketing devrait accélérer la propagation de l’usage. Dough Morris, CEO de Sony Music Entertainement est persuadé que le modèle de l'abonnement payant est le seul salut de l'industrie. Il espère bien qu'avec les 800 millions de cartes de crédit qu'elle possède, la firme de Cupertino va réussir à faire du  payant la norme.

Côté pure player, d’autres convictions émergent : "le débat publicité versus abonnement est stérile, lance Alexander Ljung, CEO de Soundcloud. Le marché de la musique est immense, pourquoi se couper de ceux qui ne pourront ou ne voudront jamais payer pour écouter de la musique ? Il faut plutôt trouver la bonne segmentation marché qui permette de délivrer nos services à l’audience la plus large possible grâce au gratuit subventionné par la publicité, et proposer un abonnement premium à ceux qui sont prêts à payer". Hans-Holger Albrecht, CEO de Deezer explore d’autres pistes : pour lui ce n’est pas la musique qu’il faut monétiser mais la valeur ajoutée des services autour. "Il faut proposer de nouvelles fonctionnalités attrayantes et expliquer aux consommateurs pourquoi ils devraient payer pour en bénéficier". Une annonce qui va dans le sens du lancement de son service de paroles de chansons avec LyricFind.

3/ La vidéo et le mobile au coeur des usages

Le mariage de la croissance du mobile et de celle de la vidéo forme un cocktail explosif dont les acteurs du streaming audio ou vidéo ont bien conscience. Vevo, Deezer ou Soundcloud, et les nouvelles jeunes pousses de l'industrie musicales concentrent tous leurs efforts sur leurs applications mobiles, futur des nouveaux usages musicaux. Les acteurs traditionnels investissent aussi : Vivendi (Universal Music, Canal+) est en passe de venir l'actionnaire majoritaire de Dailymotion, avec lequel il compte faire rayonner ses contenus musicaux et audiovisuels dans le monde entier. Une manière aussi de contourner les contrats défavorables signés avec Youtube ?

La vidéo se décline dans toutes les expériences, notamment en streaming et broadcasting-live pendant les concerts. Des innovations qui visent soit à prolonger ou augmenter l'expérience d'un concert ou d'un festival, soit à donner envie aux gens d'y participer la prochaine fois. Formats courts et clips vidéos ont ainsi le vent en poupe sur les réseaux sociaux. Tout comme la co-création vidéo, qui donne naissance à une nouvelle génération de contenus, réappropriés par les amateurs. L'application Fusic par exemple, start-up israélienne primée au MidemLab, réalise des mash-up mixant les clips de l'artiste et les vidéos selfie-karaoké des utilisateurs. Et ça fait sensation : La durée moyenne d'une session est de 11 minutes (c'est beaucoup), révèle Liat Sade Sternberg la fondatrice.

4/ L'internet des objets va aussi transformer la musique

"Les wearables en lien avec l'expérience live et les objets connectés de la maison sont les deux grandes tendances 2015", analyse Brady Forrest, le VP de Highway1, un accélérateur de start-up californien spécialisé dans les objets connectés. Les wearables s'adressent à la cible des festivaliers et des amateurs d'expériences live, un segment qui dépense 40% de plus en musique qu'un individu lambda. Les bracelets prolifèrent : pour shazamer en concert sans sortir son téléphone de sa poche (Trak), pour clignoter en chœur pendant un concert (Lucie Labs), pour vivre le temps d'un weekend sans le souci de la monnaie ou de la carte bleue (bandeaux de paiement équipés d'une puce RFID à Burning Man ou Berlin Festival) ou pour vibrer au son des basses à la maison comme pendant un concert (Basslet).

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Et pour les festivaliers qui n'auraient déjà plus de place à leur poignet, Becky Steward a présenté au concours de hacking un "Sac connecté de festival" orné de petites LED colorées. Esthétique, il alerte à la réception d'un message ou d'une pushnotification importante.

Concentrant 50% de l'écoute musicale selon l’étude "Share of Ear" d’Edition Research, la maison est le deuxième axe porteur pour les objets connectés, avec en première ligne les enceintes. Le design de l'objet, l'UX de l'interface mobile et les datas sont le nerf de la guerre. "Les objets qui émergeront sont ceux qui réussiront à tisser un écosystème autour d'eux : pour rendre accessible le contenu (des acteurs du streaming notamment) mais aussi pour croiser les données des autres objets de la maison pour devenir "context aware" prédit Brady Forrest. L'arrivée des "hub" de la maison, Homekit d'Apple par exemple, va accélérer cette intégration".

5/ La donnée, au coeur de toutes les tendances

En filigrane dans toutes les conférences, les données sont de toutes les tendances : qu'elles permettent de construire des services de streaming plus intelligents ou de mettre aux points des stratégies marketing plus efficaces, elles ouvrent des perspectives aiguisant l'appétit de l'ensemble de l'industrie.

Du côté des producteurs et des artistes, les datas permettent d'identifier les "superfans", ceux qui seront prêts à acheter albums, places de concert et produits dérivés à tout prix. Le mobile, les réseaux sociaux, les plateformes de crowdfunding et l'Internet des Objets sont des sources providentielles de datas. Un tweet par exemple contient plus de 100 métadonnées, sur le lieu, la date, l'identité de l'émetteur, les informations sur les interaction, etc.

L'enjeu est aussi de les analyser pour construire de nouveaux services pour l'utilisateur, des playlists intelligentes qui s'adapteraient au contexte par exemple. Les "vinyl diggers" qui cherchent dans les bacs les pépites musicales sont vintage. Les datas, donnant les tops des musiques les plus écoutées et les tendances émergentes, font tourner les plateformes de recommandation et de découverte musicale. Une mutation des usages qui enthousiaste autant qu'elle inquiète : les datas sont-elles capables de garantir la diversité de la création musicale ?

Monelle Barthelemy

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