Newsletter du Lundi
11/12/23

Paru dans la newsletter du

I de Silva : « Non, la régulation numérique n’est pas un voeux pieux »

Qui ?
Isabelle de Silva, ancienne présidente de l'Autorité de la concurrence.
Quoi ?
Une version éditée de son discours de départ, mercredi dernier (intégralité à lire ici), après 5 ans de mandat. La présidente  "surprise et déçue" de ne pas être renouvelée, laisse une  feuille de route, et une certaine guidance, pour un gros dossier : celui de TF1 et de M6.

Comment ?
L’Autorité est souvent qualifiée de « gendarme de la concurrence ». Je préfère personnellement le terme d’arbitre. Pour bien remplir ce poste, il faut aimer les entreprises, même si l’on est parfois conduit à les sanctionner ou à leur dire « non ». Comme un arbitre sur le terrain, nous rendons possible le jeu économique, en sanctionnant l’anti jeu ou le hors-jeu. Merci à vous pour la franchise et le respect dont vous avez fait part dans ces échanges, je les ai beaucoup appréciés.(...). J’ai eu la chance de présider à des décisions ou avis importants : Altice, TDF-Itas, Brenntag, l’affaire DMLA ou encore Apple, Google Amadeus, Google droits voisins et Google News Corp  (...)

J’arrive au terme de ce mandat avec le sentiment qu’avec mes équipes, nous avons accompli beaucoup de choses. L’Autorité n’est plus la même qu’il y a cinq ans. Elle était déjà incontournable. Elle est devenue un régulateur encore plus agile et efficace. Son action est reconnue au niveau international. L’Autorité s’est positionnée comme un acteur ouvert, faisant preuve de pédagogie ; une « boite à idées » pour le Parlement et le gouvernement, identifiant et proposant des réformes audacieuses. Sur le numérique, la voix de l’Autorité française a été entendue, y compris au niveau international, où nous avons fait progresser le débat en Europe et au-delà. Nous avons obtenu des avancées majeures. Non, la « régulation numérique » n’est pas un vœu pieux inaccessible.  (...) En définissant pour priorité de mon mandat le numérique, je suis partie d’un constat simple : aujourd’hui, les enjeux numériques irriguent toute l’économie. Ils transforment tous les secteurs. Ils sont la condition de la croissance et de l’innovation, mais ils recèlent aussi des risques nouveaux de restriction de concurrence.

(...)
Pour aborder les comportements des grandes plateformes (Big Tech ou « GAFA »), j’avais une intuition forte : il ne faut pas avoir d’esprit de système, diaboliser les GAFA ou les idéaliser. Les entreprises numériques ont apporté beaucoup d’innovations et de services performants. Il ne s’agit donc pas de vouloir les faire disparaître ou les démanteler « par principe ». En revanche, il faut les analyser « froidement », développer une connaissance pointue et experte de leurs modes de fonctionnement et de la façon dont elles interagissent avec leur écosystème – clients, distributeurs, concurrents. Une entreprise, si puissante et dominante soit-elle, n’est pas bonne ou mauvaise par elle-même. C’est à l’aune de ses comportements que l’Autorité doit intervenir, et seulement lorsqu’ils enfreignent le droit de la concurrence.

(...)
La condition du pouvoir, c’est le savoir. Il faut prendre le temps nécessaire pour construire, dans la durée, une connaissance pointue. La création du Service de l’économie numérique est un marqueur fort de cette priorité donnée au renforcement des capacités d’expertise, par le recrutement de nouveaux profils plus techniques que par le passé, ingénieurs généralistes ou data scientists.

Dès 2018, nous avons conclu la première enquête sectorielle au niveau mondial sur la publicité en ligne « Display ». Nous avons choisi ce secteur pour son importance économique – il apporte des revenus considérables à des acteurs comme Facebook ou Google, mais aussi, de façon croissante, Amazon, ou Apple. Il est aussi le « moteur financier » de nombreux sites ou contenus à valeur ajoutée. Il constitue aussi un cas d’école : un secteur « purement numérique », qui a cru très vite, et met en jeu des procédés numériques sophistiqués – algorithmes, enchères – de nouveaux acteurs, un nouvel écosystème. Cette étude a fait date, car elle constituait le premier décryptage au niveau mondial de ce « nouveau monde », et identifiait des failles ou risques concurrentiels.

C’est sur la base de ce travail que l’Autorité a pu intervenir très rapidement, et de façon inédite, lorsqu’elle a été saisie de plaintes dans ce domaine. L’affaire Google News Corp est ainsi une première mondiale par l’analyse portée sur des processus particulièrement complexes : elle reconnaît deux abus de position dominante commis par Google dans les enchères de la publicité en ligne. Pour la première fois, Google a accepté d’entrer en transaction avec une autorité de concurrence, en ne contestant pas la sanction infligée et en prenant des engagements qui, pour certains, auront une portée mondiale. Cette décision fera, je le crois, référence pour le fonctionnement concurrentiel futur du secteur, tout en permettant aux entreprises lésées – notamment les éditeurs de site – de faire valoir leurs droits.

D’autres dossiers devraient suivre : une affaire concernant Facebook, suite à une saisine de Criteo, sera ainsi examinée par l’Autorité cette semaine.

Dans cette stratégie d’expertise dans tous les champs du numérique, nous avons aussi analysé l’impact des plateformes ou de la numérisation sur les différents secteurs de l’économie « traditionnelle ». Notre but ? Donner les clefs de la concurrence à l’ère numériqueà l’ensemble des acteurs, notamment ceux qui sont confrontés à des transformations disruptives. D’où nos analyses sur :

  • -  La distribution des médicaments en ligne ;
  • -  Le commerce et la distribution en ligne (étude « phygital ») ;
  • -  Le secteur audiovisuel : notre avis sur audiovisuel et numérique a créé le débat et inspiré des modifications du régime issu de la loi de 1986, comme la levée des interdictions sur la publicité ciblée ou la publicité locale à la TV, ou encore les « secteurs et jours interdits » ; la réforme des règles régissant la production audiovisuelle est en cours ; c’est déjà un bel acquis ;
  • -  Nous avons mené une large étude sur les fintech, big tech et le secteur des paiements, qui aborde aussi les services de cloud et les crypto monnaies ; cette étude montre que le modèle des banques traditionnelles pourrait être fortement concurrencé par les acteurs des Big Tech.
  • -  Notre récente étude sur les festivals et musiques actuelles analyse, enfin, la révolution résultant, pour le secteur de la musique, de la numérisation des contenus et de l’émergence des plateformes.

Nous avons aussi mené la première étude au niveau international sur algorithmes et concurrence, avec le Bundeskartellamt (autorité allemande de la concurrence) afin d’analyser les enjeux liés à la collusion par algorithme, à l’intelligence artificielle et à la responsabilité juridique des entreprises, et ce afin de prolonger notre réflexion commune sur le Big Data19.

Le deuxième axe de notre action portait sur nos modes d’intervention : la recherche de la réactivité, notamment en utilisant pleinement l’outil des mesures conservatoires.

. La réactivité est désormais une marque de notre action, dans tous les domaines (droits audiovisuels de la Ligue  et énergie par exemple) ; elle est particulièrement indispensable en matière numérique, où les marchés et positions évoluent très vite, et où il peut y avoir un risque de « fait accompli ».

Nous avons ainsi traité plusieurs dossiers emblématiques sur le fond, mais aussi sur la méthode : l’affaire Google Amadeus sur les règles applicables à AdWords devenu Google Ads, dans laquelle notre analyse sur l’urgence et le fond a été confirmée par la cour d’appel de Paris, la décision Apple sur la sollicitation ATT introduite dans le nouvel iOs, et la décision Google droits voisins. Ces décisions ont été rendues en urgence, en quelques semaines, mais sans sacrifier la qualité de l’examen des questions de droit et de fait ou les droits de la défense. On reprochait parfois au droit de la concurrence d’intervenir trop tard et de façon inefficace. Ce reproche n’a, à mon sens, plus lieu d’être. La décision de mesures conservatoires pour Apple nous a ainsi conduit à intervenir avant même l’entrée en vigueur du nouvel iOS d’Apple. Il en a été de même dans l’affaire des droits voisins, puisque nous avons rendu notre décision quelques mois à peine après l’entrée en vigueur de la loi sur les droits voisins et les pratiques de Google contestées par les éditeurs et agences de presse.

Enfin, le troisième axe de notre action a porté sur le cadre juridique : nous avons pu prendre des décisions fortes et innovantes, à droit constant, tout en œuvrant, en parallèle, à l’enrichissement du cadre normatif, au niveau français et européen.

 

Sur la fixation des règles par une plateforme structurante :

La décision Google Gibmedia – la première sanction concernant une infraction au droit de la concurrence prononcée à l’encontre de Google en France (150 M€) – retient un abus d’exploitation à propos de la fixation et l’application de « Règles » par cette plateforme, en matière de publicité « Search ». La décision prend acte de l’importance du pouvoir par lequel les plateformes telles que Google « fixent des règles » qui s’appliquent ensuite à leurs divers utilisateurs, qu’ils soient des PME ou des consommateurs. Elle est assortie d’injonctions fortes imposant à Google de traiter les entreprises – parfois des PME – qui dépendent de la plateforme, de façon équitable, transparente, en leur expliquant pourquoi on veut les évincer, selon une procédure ménageant des délais appropriés.

Au-delà de cette décision, le droit de la concurrence peut être un outil pour lutter contre « la loi du plus fort » ou l’opacité. Les plateformes, même géantes, et parce qu’elles sont géantes, doivent traiter leurs usagers avec considération et de façon équitable.

Sur la prise en compte de la protection des données
Dans notre décision de mesures conservatoires Apple ATT26, nous avons pris en compte, pour la première fois, la dimension « protection des données » dans notre analyse concurrentielle. Cette décision a bénéficié d’une coopération poussée avec la CNIL pour l’instruction du dossier. La décision identifie par ailleurs, pour la première fois, la notion de « plateforme structurante » et énonce qu’une entreprise, même dominante ou structurante, a le pouvoir de « fixer des règles » chez elle : elle doit simplement veiller à ce que ces règles n’enfreignent pas le droit de la concurrence. Nous nous sommes livrés ensuite à une analyse précise des comportements d’Apple pour déterminer si la mise en place de la sollicitation ATT pouvait être regardée, à ce stade préliminaire, comme susceptible d’être anticoncurrentielle. L’instruction se poursuit au fond pour déterminer s’il a pu y avoir des pratiques relevant du « self preferencing » – ou traitement préférentiel – de la part d’Apple.

Sur les pratiques de distribution d’un acteur en position dominante

La décision Apple sur la distribution des produits électroniques constitue la plus forte sanction jamais prononcée par l’Autorité (1,1 milliards d’Euros) à une entreprise. C’est qu’elle portait sur des pratiques vastes, durables, qui ont réduit à néant la concurrence dans la filière de distribution des produits Apple très appréciés des consommateurs. On notera aussi une application de l’abus de dépendance économique, concernant la situation des distributeurs dits APR (pour Apple Premium Reseller), revendeurs spécialisés indépendants mais dédiés, qui subissaient de fortes contraintes de la part d’Apple sans contrepartie, et ont pour certains connu de grandes difficultés financières.

Vous le voyez, on peut déjà faire beaucoup « à droit constant ». Mais nous nous sommes aussi investis fortement dans la rénovation du droit de la concurrence. Cela a été un chantier important, dans lequel nous avons cherché à être force de proposition.

Dans cette évolution, plusieurs avancées majeures ont été réalisées : sur le plan des moyens d’enquête, la création par la loi PACTE d’un dispositif permettant à l’Autorité, de façon encadrée, de recourir aux « fadettes » pour mener à bien ses enquêtes, puis, la directive européenne dite ECN,, à la négociation de laquelle nous avons fortement contribué, et qui crée un cadre européen d’application du droit de la concurrence renforcé et harmonisé, avec notamment la faculté d’auto saisine en mesures conservatoires, l’opportunité des poursuites (qui permettra à l’Autorité de mieux concentrer ses moyens sur les dossiers les plus stratégiques), l’avènement d’un régime de sanctions plus dissuasif pour les pratiques anticoncurrentielles commises par les organisations professionnelles, le recentrage des déterminants des sanctions autour des notions de durée et de gravité, la possibilité de prononcer des injonctions structurelles, l’accès aux données numériques, le régime de liberté de la preuve aligné sur le régime pénal... Ce texte comporte en outre un riche volet institutionnel : les autorités nationales de concurrence sont désormais placées sous la protection du droit européen, garanties dans leur indépendance, leurs moyens financiers, et leur capacité à infliger des sanctions administratives en cas de méconnaissance des articles 101 et 102 ou en cas d’obstruction aux enquêtes.

La loi DDADUE de 2020, pour sa part, a permis une modernisation importante du cadre procédural d’action de l’Autorité, visant une plus grande efficacité et célérité – avec l’autorisation des visites et saisies par un juge unique pour tout le territoire, la présence d’un seul officier de police judiciaire par site lors de ces opérations, la réforme de la procédure contradictoire, celle de la procédure de clémence et du régime d’édiction de certaines décisions de l’Autorité, ou encore la possibilité de renvoyer au ministre de l’économie certaines pratiques anticoncurrentielles d’ampleur limitée.

Pour la rénovation de la politique de concurrence, nous avons aussi investi fortement la coopération internationale pour infléchir ses priorités, renforcer les liens bilatéraux et multilatéraux et façonner de nouveaux outils internationaux de régulation.

Cette coopération internationale est essentielle, car nous devons traiter d’enjeux et d’entreprises qui sont mondiaux. Il faut donc que tous les régulateurs se rapprochent – en France et à l’étranger, et œuvrent en commun, de façon beaucoup plus resserrée et interactive qu’auparavant, pour mener des politiques cohérentes ou renforcer l’efficacité de leurs enquêtes respectives.

La France a ainsi fait « bouger les lignes » en matière de contrôle des concentrations.

Dans la lignée de notre Contribution au débat sur la politique de concurrence et les enjeux numériques de février 202031, dans laquelle nous proposions d’ouvrir plusieurs chantiers conceptuels – la notion de dominance, la définition des marchés pertinents – nous avons œuvré pour une modernisation forte du contrôle des concentrations, afin de pouvoir examiner les acquisitions « sous les seuils » qui présentent un enjeu concurrentiel. Après une vaste concertation au niveau national, l’idée a été reprise par la Commission européenne et a débouché sur une approche renouvelée – un « retour aux sources » - de la mise en œuvre de l’article 22 du règlement européen de 2004 sur les concentrations. Une première opération de concentration « sous les seuils » (le rachat de Grail par Illumina) est aujourd’hui examinée par la Commission, après un renvoi effectué par la France, et soulève des enjeux concurrentiels notables dans le domaine de l’innovation en matière de santé (la « cible » élabore actuellement des tests très novateurs permettant de détecter les cancers à un stade précoce). L’enjeu était d’importance : remédier à un « angle mort » pouvant permettre à des opérations comme le rachat par Facebook d’Instagram ou de WhatsApp d’échapper à tout examen.

Pour que l’Europe soit écoutée en matière de numérique, il faut aussi que ses efforts soient relayés outre-Atlantique ou en Asie.

A cet égard, je suis particulièrement fière du succès de l’initiative que nous avons portée dans le cadre du G7 : sous la Présidence française, nous avons pu, pour la première fois, établir un accord de coopération en matière de numérique et de concurrence avec l’ensemble des autorités de concurrence des pays du G7, y compris les Etats-Unis. Le «Common understanding » ainsi signé à Paris en 2019 a marqué un rapprochement des positions américaines et européennes, et s’inscrit désormais dans la durée : les Britanniques ont poursuivi l’exercice sous leur présidence du G7 et les Etats-Unis, initialement plutôt réservés, ont déclaré il y a quelques jours à New-York qu’ils s’inscriraient eux aussi pleinement dans ce nouveau cadre.

J’ai la conviction profonde que la coopération internationale dans tous les forums : REC, OCDE, ICN, bilatérale, thématique, est la clef pour avancer mieux ensemble et être beaucoup plus efficace. Il faut que nous fassions jouer nos propres effets de réseau, pour « prendre en tenailles » certaines problématiques et mener des actions qui se complètent, se démultiplient en parallèle, ou se succèdent. La coopération ne doit pas être un mécanisme routinier : c’est. la clef pour que l’Europe reste forte, unie, puisse agir en commun. C’est la condition d’un impact bien plus important au niveau international.

J’ai toujours attaché un prix particulier à notre insertion dans le REC, et fait tout mon possible pour avancer « main dans la main » avec la Commission européenne. L’action menée par Margrethe Vestager et ses remarquables équipes a été une inspiration constante et nous avons tout fait pour la renforcer. La politique européenne de concurrence est l’une des plus belles réussites du projet européen, il faut le dire et préserver cette belle réalisation en lui donnant l’appui des autorités nationales.

Sur le numérique notamment, l’intensification de la coopération de l’Autorité avec les partenaires internationaux, particulièrement DOJ et FTC aux Etats-Unis, ACCC (Australie) et CMA (Grande Bretagne), et la volonté de consolider la coopération « franco-allemande » avec le BKartA, mais aussi avec de nombreux partenaires européens (CNMC, AGCM, ACM, APC, autorité grecque), ont permis de diffuser plus vite les bonnes idées, les analyses, les enquêtes, d’inspirer des réformes mises en œuvre en France.

(...)Le contrôle des concentrations a été recalibré pour en faire un outil plus efficace et ciblé, tout en approfondissant le contrôle sur les opérations les plus sensibles. Nous avons voulu faire œuvre de pédagogie pour les entreprises, avec nos nouvelles Lignes directrices en matière de concentrations et être toujours plus réactif et agile dans notre pratique : l’allègement des informations demandées dans les cas « standard », la mise en place de la notification entièrement en ligne en témoignent.

Au cours de cette période de cinq années nous avons pu autoriser des regroupements importants – qui ont parfois conduit à constituer ce qu’on pourrait qualifier de « champions européens » (par exemple entre Se Loger et LogicImmo). Mais ces rapprochements se sont faits sans dégradation de la concurrence.

Nous avons su lever des contraintes devenues trop lourdes résultant d’engagements passés, lorsqu’elles n’étaient plus justifiées par la situation concurrentielle (ainsi des injonctions dans l’opération Canal Plus /TPS, ou des engagements relatifs à l’acquisition de SFR parAltice). Nous avons pu accompagner la restructuration des enseignes du commerce de détail, en étendant par exemple la jurisprudence Fnac / Darty au secteur des jouets, et en autorisant de nombreuses recompositions (dans la distribution alimentaire ou le secteur de l’habillement) ou encore dans les télécoms.

Lorsque l’opération nuisait trop à la concurrence, ou au consommateur, nous avons, pour la première fois, prononcé des interdictions.

Notre vigilance sur l’application du droit de la concurrence s’est fait sentir dans tous les secteurs de l’économie.(...)
Nous avons pu, en outre, faire avancer l’analyse concurrentielle dans la distribution, avec le nouveau cadre d’examen des centrales d’achat résultant de la loi EGALIM52, et l’ouverture de deux procédures dans ce nouveau cadre, débouchant sur deux décisions concernant Auchan, Casino, Metro et Schiever, et Carrefour et Tesco.

Cette action répressive a été forte. L’Autorité a ainsi été reconnue comme l’une des plus actives au niveau international, par son action dans les différents domaines.

(...)

Il reste encore beaucoup à faire. Aujourd’hui, l’enjeu majeur reste celui de la transformation numérique de l’économie.

La crise du Covid-19 a illustré à la fois notre dépendance vis-à-vis des outils et services numériques (imaginons une entreprise devant travailler sans outils de visioconférence, sans site de vente en ligne, sans une bonne connexion de réseau...), et aussi son formidable potentiel. La crise – ce sera son legs « positif » – a rendu possibles des mutations d’une ampleur et d’une rapidité jamais vues : tout un pays mis à l’arrêt pendant le confinement a continué à fonctionner quasiment sans accroc, que ce soit l’Etat ou les entreprises, même les plus petites. Bien sûr, les entreprises aux prestations « physiques » ont le plus souffert – par exemple les restaurants-, mais elles ont su s’adapter, par exemple en réalisant des repas à emporter ou livrés ou en créant des sites de vente en ligne.

Cette crise a renforcé ma conviction : c’est la concurrence qui donne à l’économie française sa force vitale qui pousse chacun à s’améliorer en permanence.

La crise nous en a donné de nombreux exemples : alors que nous devions nous adapter très vite aux nouveaux modes de travail, nous avons eu souvent le choix entre différents outils de visioconférence: Webex, Zoom, Teams, etc, et avons pu comparer les différentes fonctionnalités (chat, présentation...), modèles économiques, options de confidentialité, etc. In fine, nous avons pu choisir le système qui nous convenait le mieux, ou recourir au multi- homing. Nous aurions été moins bien lotis si nous avions eu un seul logiciel en « monopole » ou si nous avions eu des freins techniques au niveau de nos téléphones ou ordinateurs.

Un autre exemple est celui des vaccins.(...). Voici les bienfaits de la concurrence qu’il faut préserver à tout prix, y compris dans le domaine de la santé et des biotechnologies.

Pour transformer l’essai dans le numérique, il faudra faire aboutir la négociation sur le DMA et mettre en place les conditions d’une coordination optimale avec l’application du droit de la concurrence. J’ai bon espoir qu’une solution soit trouvée pour associer les autorités nationales de concurrence à la mise en œuvre de ce texte, comme nous l’avons expliqué dans la position commune du REC présentée avant l’été. Il faudra, aussi, approfondir encore la coopération avec les autorités américaines et mettre à profit la convergence accrue que nous constatons aujourd’hui avec nos alliés sur la régulation concurrentielle des plateformes et l’innovation ; main dans la main avec les agences américaines, nous devons partager nos priorités, notre vision.

Parmi les sujets de demain, celui du développement durable doit être approfondi.  (...) A l’avenir, l’Autorité pourrait aussi mener une action plus forte sur les pratiques concertées affectant les marchés du travail. Les Etats-Unis ont montré la voie en la matière. Au-delà des actions déjà menées, il faudra poursuivre ce chantier
Enfin, sur le front des concentrations, de grosses opérations sont en cours ou en perspective : entre TF1 et M6, ou des rapprochements dans le commerce de détail.
TF1-M6 : des tests jusqu'à novembre

S’agissant du dossier TF1 / M6, le travail a été bien entamé. Les tests de marché ont commencé et vont se poursuivre jusqu’à novembre. Il reste maintenant au marché à s’exprimer. (...)
Je pars avec une conviction. La concurrence n’est pas la réponse à tous les maux, mais elle est la garantie d’une économie dynamique, qui respire et laisse la place aux nouveaux entrants, qui amènent le vent de l’innovation. Alors que la reprise post Covid-19 se dessine, l’économie française a besoin, plus que jamais, de concurrence et d’une Autorité qui la fasse vivre.

 

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