Qui ?
Anne Browaeys, Directrice Générale Marketing, Digital & Technologies du Club Med.
Quoi ?
Un entretien sur la stratégie mobile du groupe, à l'occasion du MMA Forum à Paris, dont Petit Web était partenaire.
Comment ?
- En 2017, le Club Med a opéré un virage vers la publicité mobile. Pourquoi ?
La part de nos investissements publicitaires sur le mobile est passée de 16 à 64% du budget total. C'est un virage significatif pour être au rendez-vous des usages de nos clients, car le digital fait partie de leur quotidien. Le Club Med est tout sauf un séjour digital : sur place, nous allons privilégier l'humain, mais en amont, nos clients préparent leur vacances sur leur mobile. Nous l'avons constaté avec le trafic naturel sur le site : plus de 60% de notre trafic se fait depuis un mobile et smartphone. Cela a forcément impacté nos stratégies d'achat média : nous essayons d'être dans le même tempo que nos clients sur leur parcours.
- Comment s'est opéré un tel virage ? Des conseils à donner aux annonceurs et agences ?
La première étape est d'être "mobile first" sur le site internet, pour offrir une expérience qui corresponde à l'usage des clients. Au Club Med, le chantier a démarré il y a deux ans. C'est un effort permanent. Une fois que ces bases étaient relativement saines, on a pu accélérer sur nos stratégies médias en ligne. Plus largement, on a repensé notre "playground" de communication et toute la façon de réaliser nos campagnes.
- En quoi cette approche diffère-elle ?
Il y a encore un an, notre première campagne "Amazing you" avec l'agence Fred et Farid était pensée pour la TV et le cinéma. On a filmé en 16/9ème une publicité faite pour être vue avec du son. On avait déjà un style créatif multi-caméras pour plus d'authenticité mais les formats étaient traditionnels. Il fallait ensuite les adapter autant que possible aux plans mobiles, encore minoritaires. Six mois plus tard, on a réalisé le tournage de la campagne "Hiver", diffusée en ce moment, d'abord pour le mobile. Elle a été tournée pour des formats verticaux et carrés. Le script a été pensé pour que la vidéo fonctionne aussi sans le son. La vidéo a ensuite été adaptée en 16:9ème, et déclinée en format une minute pour nos médias propres, mais aussi en 15, 10 et même 5 secondes pour certains pays.
- Quel est votre nouveau mix média ?
Une grande majorité de notre budget mobile est consacré à Google, Facebook et au programmatique. On a besoin d'effets d'échelle car le groupe est présent commercialement dans 28 pays. C'est un choix pragmatique, nous ne pouvons pas nous permettre de diluer nos efforts sur trop d'actions dispersées. Les formats vidéos sont majoritaires en "upper funnel", la phase d'inspiration où il est essentiel de donner à voir le produit, l'émotion du Club Med et le bonheur.
- Quel est votre principal défi pour 2018 ?
L'attribution a été un très gros enjeu en 2017. Il demeure en 2018 un caillou dans la chaussure. Nous avons des modèles d'attribution, on travaille par exemple avec Atlas de Facebook, on va tester Google 360. Différentes mesures omnicanales nous montrent que le mobile est très contributeur à la conversion. Néanmoins, quand on pilote des campagnes au jour le jour et qu'on utilise des outils d'optimisation de bidding en achat de mots clés, la tendance naturelle est de regarder le dernier clic, et là, c'est très défavorable au mobile.
Dans les pays les plus avancés, on utilise Freespee pour mesurer tous les appels générés depuis le site et recalculer les rentabilités des campagnes en attribution et en conversion multicanal. Sur les pays où on n'a pas cet outil, on opte pour des indicateurs plus simples, par exemple le coût par entrée dans le booking engine (le coût d'un visiteur très qualifié). Nous sommes dans une démarche d'apprentissage permanent. On voit aussi que notre travail en ciblage média et en création porte des fruits. Nos performances augmentent sur les taux de complétion des vidéos, dans un environnement publicitaire pourtant très concurrentiel.
- La réalité virtuelle sera-t-elle format publicitaire de demain ?
Pour nous, la réalité virtuelle 360 est un format d'aujourd'hui. Le Club Med a été précurseur sur le sujet, les premières vidéos ont été développées fin 2015. Toutes nos agences en France, en Belgique et en Suisse sont équipées de casques et 40 de nos villages sont visitables via des films en VR ou via Google Street View. La réalité virtuelle répond à une demande très forte d'émotion et d'authenticité de la part de nos clients. C'est la preuve que l'image n'est pas photoshoppée. On commence à franchir une nouvelle étape, en utilisant ces formats en publicité et sur le site. Sur les 6 derniers mois, quand on compare sur une fiche Resort Club Med le taux de conversion des visiteurs qui utilisent et celui de ceux qui n'utilisent pas le bloc multimédia, la différence est de 41%.
Propos recueillis par Monelle Barthélemy