Qui ?
Benjamin Lequertier, directeur marketing France de Facebook, ex-Google, DDB et Apple, en poste depuis janvier 2014.
Quoi ?
Une interview pour faire le point sur les enjeux publicitaires de Facebook : vidéo, synchronisation TV/Web, mobile, monétisation d'Instagram...
Comment ?
- Un directeur marketing pour Facebook en France, ça sert à quoi ?
Mon rôle est principalement de positionner la marque Facebook auprès des annonceurs, des agences et des PME, tout en montrant que Facebook est impliqué dans l'écosystème français. Pendant longtemps, l'offre de Facebook pour les annonceurs a été assez complexe. Nous l'avons désormais beaucoup simplifiée et l'objectif est maintenant de communiquer dessus.
- Depuis quelques temps, vous communiquez abondamment autour de la vidéo : Facebook est-il en train de devenir le nouveau Youtube ?
Effectivement, c'est une priorité pour nous depuis quatre ou cinq mois. En juillet, nous avons lancé le format vidéo premium en Europe - avec un annonceur Français d'ailleurs, Guerlain. Plus récemment, la bande-annonce de Fast&Furious 7 a été diffusée en novembre dans le monde entier, sur Facebook et Youtube. En 48h, nous avons généré 100 millions de vues, contre 18 millions sur Youtube. Cela tient à la force du support : Facebook est un lieu de découverte, alors que les gens vont sur Youtube plutôt pour chercher un contenu précis.
- La différence, c'est surtout le fait que les vidéos se lancent automatiquement dans le newsfeed et sans le son...
Il s'agit du même mode de calcul : les vues sont comptabilisées après 5 secondes de visionnage, comme sur Youtube. Et nous assurons 100% de visibilité à nos annonceurs. D'ailleurs, il ne faut pas croire qu'une vue sur Youtube signifie que la vidéo a été visionnée jusqu'au bout.
- En fait, plus que Youtube, vous semblez maintenant vouloir concurrencer la télévision... Des tests de synchronisation entre la télé et Facebook ont été menés aux Etats-Unis, qu'en est-il en France ?
Nous travaillons avec tout un écosystème de partenaires, comme Social Moov, notamment, qui propose en France une offre "Mediamplify", qui permet la synchronisation spot à spot.
- Mais à quoi ça sert de diffuser de la publicité sur Facebook au même moment que son spot TV ?
Cela permet principalement de toucher les gens en multiscreen, pour recapter l'attention, tout en augmentant la couverture et éventuellement la répétition du plan. On note une vraie demande de la part des annonceurs sur cette offre de synchronisation. Mais pour être honnête, la mesure n'est pas du tout à la hauteur. Certes, Médiamétrie vient de lancer XCR, pour la mesure cross-canal TV/web. Mais sans y intégrer le mobile ! C'est absurde de lancer ça aujourd'hui...
- Avec la vidéo, vous proposez aussi aux annonceurs une offre puissante sur le branding, alors que le discours commercial tournait jusqu'à récemment autour de l'engagement. Les likes et les fans pages, c'est fini ?
Aujourd'hui, nous avons un message hyper fort : Facebook est un média. Il est et restera social, au sens où l'engagement est un vecteur de partage de l'information. Mais comme la presse, nous sommes dans une démarche de découverte. Les gens nous utilisent pour découvrir des articles, des photos, des vidéos. Dans notre offre à destination des annonceurs, nous avons maintenant deux axes : la performance d'un côté et le branding de l'autre. Aujourd'hui, les marques peuvent raconter des histoires avec toute une gamme de produits qui n'existaient pas il y a six mois.
- Comme pour Google, est-ce que les PME sont un axe important de développement pour vous ?
Sur le million d'annonceurs actifs dans le monde sur notre plateforme, une immense majorité sont des petites entreprises. Sans avoir des équipes aussi développées que celles de Google, nous avons aussi des commerciaux en charge de ces sujets, c'est une priorité. Nous avons un rôle à jouer pour les aider à se développer, notamment à l'export. Prenez l'exemple de BlaBlaCar, qui s'est récemment lancé en Turquie, en utilisant principalement Facebook : le Facebook Connect a été rendu obligatoire et ils investissent 70% de leur budget marketing chez nous.
- Et sur le mobile, où en êtes-vous ?
Aujourd'hui, 66% de nos revenus sont issus du mobile, notamment parce que nos formats sont perméables sur le mobile et le fixe. Nous avons aussi une offre qui fonctionne très bien pour promouvoir des applications et, surtout, faire revenir les gens dessus. Nous regardons aussi avec attention tout ce qui se passe sur Instagram, qui commence à être monétisé aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne depuis quelques mois. Nous espérons que la publicité sera lancée en France dans la première moitié de 2015. Nous observons un gros appétit autour de cette plateforme visuelle unique, où l'on trouve une communauté très créative. Les marques l'utilisent déjà depuis longtemps.
- Et pour Whatsapp, qui ne devrait pas être financé par la publicité ?
Lors de la dernière réunion d'analystes, Mark Zuckerberg a détaillé sa vision à dix ans pour Facebook : la problématique de la monétisation de la messagerie va se poser dans les trois ans à venir. Les modalités ne sont pas encore définies, il y a plein de façons de voir les choses.
Propos recueillis par Benoit Zante