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Pour Deloitte, le CDO va devenir aussi inutile qu’un « Chief Email Officer »

Qui ?
Peter Hughes, Digital Strategist and Experience Designer de Deloitte Canada.

Quoi ?
Les conclusions d'une étude de sept mois menée par Deloitte Digital sur la fonction de "Chief Digital Officer" (ou "Chef des Services Numériques") et son avenir, présentées lors d'un séminaire à C2 Montréal.

Comment ?

Dans son étude, Deloitte Digital explique l'engouement récent autour de la fonction de Chief Digital Officer par la convergence de la stratégie globale des entreprises avec leur stratégie numérique : le digital n'est plus un élément à part, cantonné à l'e-commerce, aux médias ou à l'informatique comme par le passé, il est devenu central dans la plupart des grands groupes.

Mike Brinker, le chef mondial du cabinet de conseil, distingue trois types de CDO :
- les spécialistes du marketing numérique, issus du monde des agences
- les "stratèges de la transformation numérique", qui ont pour mission de réinventer leur organisation
- les "technologues", qui sont généralement rattachés à la DSI.
Chaque profil correspond à un type d'entreprise en particulier : les CDO orientés marketing se retrouvent principalement au sein des marques de grande consommation, les stratèges, dans les médias, le retail et la high-tech, et les "technologues", plutôt dans l'industrie lourde et la santé.

"Catalyseur qui complète le mandat de ses pairs [directeur marketing, DSI, directeur des opérations et PDG], le CDO est le seul à pouvoir rallier les membres de la direction. Car il envisage globalement la manière d'exécuter la stratégie de l'entreprise sur tous les canaux numériques" estime Peter Hughes. Pour autant, son avenir n'est pas rose : Deloitte prédit déjà une "déflation" dans les années à venir, "l'équipe du numérique va devenir un groupe non stratégique, chargée de gérer le contenu, les plates-formes et les applications."

La raison de ce déclin annoncé des CDO ? "Dans beaucoup de secteurs, le numérique sera tellement imbriqué dans l'ADN de l'entreprise que cela n'aura plus de sens d'avoir un chef et une équipe de services numériques fonctionnant séparément, pas plus que nous voyons aujourd'hui des 'Chef Email Officers'." Ce constat de l'obsolescence programmé des CDO est partagé par les CDO eux-mêmes, cf BNP Paribas (lire notre interview) ou L'Oréal (lire notre article).

Le CDO doit aussi faire face à un autre défi : comment co-exister avec la direction marketing et la direction informatique ? "Ce serait stupide de prétendre qu'il n'y a pas d'empiètement. Pour dépasser les tensions, tout dépend de la culture de l'entreprise, de la personnalité des dirigeants et des indicateurs de performance qui ont été attribués à chacun." Il cite l'exemple de la banque canadienne TD, dont le CDO avoue empiéter parfois sur les plate-bandes de ses collègues, sans encombre... au nom de l'amélioration de l'expérience client, l'une des valeurs clé de l'entreprise.

Au-delà de la question du CDO, de ses fonctions et de son positionnement au sein de l'organigramme, les entreprises doivent aussi se poser la question de l'attraction et de la gestion des talents du numérique. "Pour que le rôle du CDO et de son équipe fonctionne, l'organisation élargie doit se demander si elle est prête à engager le travailleur numérique moderne et à composer avec lui" écrit Peter Hughes.

Cela passe aussi bien par l'installation d'espaces de bureaux "non traditionnels", la remise en question des méthodes de travail, le recrutement de profils différents, (connaissances en design et en UX), ou encore une modification du code vestimentaire de l'entreprise... "pour nous adapter aux gens qui choisissent de porter des jeans et d'exposer leurs tatouages."

Benoit Zante

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