Newsletter du Lundi
11/12/23

Paru le

L’Intelligence Artificielle, le nouveau défi du marketing

Qui ?
Manuel Diaz, directeur général de l'agence Emakina (en photo), Vincent Perrin, Watson Technical Advisor Europe d'IBM et Kim Younes, Directrice marketing innovation & études chez M6.

Quoi ?
Un aperçu des grands enjeux de l'Intelligence Artificielle pour les marques, lors de la matinée Grand Format, "IA, stop au blabla, place aux cas", organisée par Petit Web avec Emakina.

Comment ?

Le marketing va-t-il être bouleversé par l'Intelligence Artificielle, comme de nombreux autres secteurs ? Pour l'heure, le discours précède encore les actes, mais les entreprises ont tout intérêt à s'y préparer. Celles qui sauront l'exploiter de façon pertinente avant leurs concurrents pourront marquer des points auprès de leurs clients... et espérer survivre à Amazon, Google, Facebook, Apple et autres Alibaba, qui donnent le "la" dans ce domaine.

"Deux mondes vivent à un vitesse différentes : d'un côté, 80% des clients se disent prêts à payer plus cher, s'ils ont une meilleure expérience client au moment de l'achat, et de l'autre, seules 38% des marques utilisent la donnée dans la conception de leurs expériences-client" pointe Manuel Diaz, citant des études respectivement de Cap Gemini et Forrester.

Sans données, pas d'IA

Avant se poser la question de l'Intelligence Artificielle, les entreprises doivent s'attaquer au sujet de la donnée. Malheureusement, au sein des grands groupes la culture de la donnée n'en est encore qu'à ses balbutiements. Par exemple, études de marché et panels consommateurs classiques n'ont pas encore été supplantés par l'analyse des données en temps réel. "Pourtant, c'est beaucoup plus intéressant d'analyser les centaines de millier d'utilisateurs de vos applications et sites internet, que de s'appuyer sur un millier de Français interrogés par un institut de sondage" estime Manuel Diaz.

Mettre en place une stratégie "data" ne signifie pas nécessairement chercher à récolter toujours davantage d'informations : encore faut-il être en capacité de les traiter. "Chez nos clients, il y a beaucoup de données non structurées. Même dans la façon de les collecter, on observe peu d'empressement à la structurer. Ne vous battez pas seulement pour capter de la donnée, battez-vous pour l'organiser !"

Avec sa technologie Watson, IBM arrive avec une proposition séduisante : celle de permettre à toute organisation d'"exploiter des données plus ou moins structurées" de façon très simple. "A partir de 2014, nous avons rationalisé l’ensemble de nos services pour pouvoir les exploiter de plus en plus facilement, avec le langage naturel, qui permet une vraie conversation entre Watson et l'utilisateur. Watson est capable de raisonner, d'évaluer, et surtout d'évoluer au fil du temps" explique Vincent Perrin. A terme, Watson devrait être capable d'analyser aussi bien du texte que des images ou de la vidéo.

Un enjeu : offrir des expériences personnalisées

La recommandation de contenus et la personnalisation des communications figurent parmi les premières applications de l'Intelligence Artificielle dans le domaine du marketing : Netflix, Amazon, Facebook ou Criteo s'en sont fait une spécialité. Mais beaucoup de marques trainent, faute de données et de ressources en interne. "Désormais, les utilisateurs acceptent difficilement que la page d'accueil d'un site ou d'une application soit la même pour tous" estime Manuel Diaz.

Si les consommateurs sont demandeurs d'expériences davantage personnalisées, ils ne sont pas prêts pour autant à confier les yeux fermés leurs données à des marques. Gare aux expériences décevantes... "Une entreprise qui ne rend pas un service personnalisé en échange de données génère de la déception. Les consommateurs vont finir par discriminer les marques qui ne sont pas capables de faire de la personnalisation à l'échelle de l'individu" prédit Manuel Diaz.

Pour y parvenir, les entreprises vont devoir casser leurs silos. "L'Intelligence Artificielle amplifie la problématique de la multi-canalité : il va falloir des organisations de plus en plus transverses, avec un outil qui fait communiquer la donnée entre les silos" explique Vincent Perrin.

Se préparer aux interfaces conversationnelles

L'arrivée de nouvelles interfaces, avec les enceintes connectées (Google Home, Amazon Alexa, Apple HomePad) et les chatbots sur Messenger, qui reposent sur la conversation en langage naturel, représente un nouveau chantier, lié aux problématiques de données et d'IA... "Si vous êtes une marque BtoC et que vous ne vous préparez pas à ces nouvelles interfaces, vous avez un problème. Il est temps de travailler sur les API qui vont permettre de vous connecter à ces plateformes" estime le patron de l'agence Emakina, qui regrette que pour l'instant, l'intégration de l'Intelligence Artificielle aux chatbots reste encore embryonnaire et souvent décevante.

Sur son site e-commerce, The North Face a ainsi testé une nouvelle manière de vendre, de façon personnalisée, en reprenant les questions et les étapes suivis par les vendeurs en magasin pour conseiller les clients. Un seul produit était concerné par le test, mais le dispositif donne un premier aperçu de ce que pourrait être l'e-commerce de demain.

Aux Etats-Unis, dans la foulée de ce que propose Amazon Echo, le distributeur de fournitures de bureaux Staples travaille avec IBM pour concevoir un bouton "intelligent", qui, grâce à un échange vocal en langage naturel, permet d'enregistrer les commandes tout en prenant en compte l'historique d'achat du client.

En France, à l'occasion du lancement de la série The Young Pope, BETC et Canal + ont lancé compte Twitter, à partir duquel le Pape Pie XII adressait des messages personnalisés, générés grâce à Watson et à son analyse de l'Ancien Testament.

 

Comprendre les émotions : la prochaine étape

"La reconnaissance des émotions grâce à l'Intelligence Artificielle est l'enjeu de demain, notamment avec la sortie de l'iPhone X qui intègre la technologie Face ID et sera capable de capter vos émotions" explique Manuel Diaz. Grâce à l'étude des émotions et du sentiment, les réponses et les contenus proposés par l'Intelligence Artificielle pourront être encore davantage personnalisés.

Chez M6, des équipes travaillent depuis deux ans sur ce thème et préparent activement le lancement d'une offre d'analyse sémantique appliquée à la publicité, pour permettre de meilleurs ciblages. "Pour un annonceur, il vaut mieux diffuser son spot après un contenu qui est dans le même registre émotionnel : la mémorisation est augmentée de 12% en moyenne" explique Kim Younes. Afin de mesurer cet impact, la chaîne a mené une étude avec Harris Interactive, en s'appuyant sur des techniques de neurosciences.

En 2018, les annonceurs de M6, en télévision mais aussi sur le Replay, pourront cibler les moments de diffusion les plus propices, en fonction de la tonalité de leurs messages, analysée par Semantiweb. Pour les identifier, la régie s'appuie sur l'analyse des sous-titres des programmes, et distingue six émotions (joie, surprise, rire, frisson, être ému, nostalgie). Coca-Cola sera le premier annonceur à utiliser le dispositif, en exclusivité dans un premier temps.

Attention, l'IA n'est pas une baguette magique

L'IA est le concept à la mode, utilisé à tout va, mais sans avoir encore fait totalement ses preuves. Par exemple, les détracteurs d'IBM lui reprochent d'avoir surtout appliqué le marketing à l'IA, plutôt que l'inverse... Vincent Perrin le reconnait : "il y a peut-être eu des sur-attentes de la part de nos clients. Nous avons trois ans de maturité sur le sujet. Aujourd'hui, on explique clairement ce que Watson est capable de faire, on montre ce qui va prendre du temps. Il ne faut pas s'attendre à ce que l'Intelligence Artificielle prenne un document et apprenne tout seul : c'est un apprentissage supervisé, qui demande de la patience."

De la patience, certes, mais pour beaucoup, le temps presse : 30% des PDG américains interrogés par Forrester se disent prêts à virer leurs directeurs marketing parce qu'ils ne vont pas assez vite (ou n'ont pas les compétences) dans le domaine de la donnée... Manuel Diaz se veut plus rassurant : "la génération de directeurs marketing qui arrive sera celle des prochains PDG"... à condition pour leurs entreprises de prendre à temps la vague de la donnée et de l'IA.

Benoit Zante

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