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Le CES 2020, sa patate connectée, et sa purée techno

Qui ?

Notre équipe, bien planquée de ce côté-ci de l'Atlantique, mais avec ses antennes à Vegas.

Quoi ?

Une succession de gros plan, panoramique et accéléré de cette énorme foire de la technologie, pour toi lecteur chéri.

Comment ? 

Panoramique : les chiffres

4.500 entreprises exposantes, et 170.000 participants. Il y a quatre ans, Georges-Edouard Dias (ex L'Oréal, Quanstream) dénonçait dans nos colonnes la Foirfouille Frenchtech, qu'il opposait à d'autres pays, comme Israël, exposant moins, et mieux. Ne pas confondre qualité et quantité, le message a mis du temps, mais il a été entendu. En 2020, la France avait un tiers d'exposants en moins qu'en 2019. Alors que le CES continue, lui sa course au gigantisme : 25 % d'exposants supplémentaires cette année.

Sébastien Bourguignon, Directeur Conseil chez Sopra Steria Consulting a vu des centaines de start-up, mais pour lui, côté Français, c'est toujours un peu la Foirfouille : "Il n'y a pas de catégorisation, c’est par région. Du coup, on passe de la litière connectée à la data privacy, aux personnes dyslexiques. C'est un peu dommage." Quatre ans après Georges-Edouard Dias, il fait aussi spontanément le parallèle avec Israël, "qui présente moins de sociétés mais des sociétés plus matures, dont on sent qu'elles vont dominer leurs marchés."

Focus : la pomme de terre connectée, super star

Nicolas Baldeck (en photo) a déjà plusieurs CES au compteur, ce qui lui a permis de réussir, à lui seul, l'opération de hacking 2020, avec sa pomme de terre connectée. Nous l'avons interrogé, et l'histoire qu'il nous a contée montre que cette opération a été conçue par quelqu'un qui connait bien le salon et n'a pas eu à s'en plaindre : "Je n'ai pas voulu ridiculiser le CES. C’est un salon où il y a des innovations majeures. On y voit de tout, des produits au stade de prototype d’impression 3D, qui n'auront jamais de quoi atteindre le marché global, et des projets what the fuck. La vogue des objets connectés aboutit à des absurdités : pour allumer mon ampoule Wifi, je dois sortir mon téléphone pour appuyer sur un bouton. Où est le progrès par rapport au bon vieil interrupteur ? J’ai acheté le fameux thermostat Nest de Google. C’est un appareil dans lequel il y a tellement d'électronique qu’il en devient incapable de mesurer la température. Il coûte 350 €. Alors que le vieux thermostat à 30 € fonctionne, lui. Au CES, il faut absolument tout connecter. A force de réfléchir à cela, je me suis dit : '"Je vais faire le coup de la patate. De toute façon dans un salon professionnel, on paye et on a un stand. Autant aller au bout de la logique." Résultat ? "Je savais que ça allait faire du buzz mais pas au point d’être l'un des stands les plus populaires du salon, avec une queue de 20 personnes en permanence, et surtout, le premier résultat de Google sur la requête CES." Sans compter des reportages de BFMTV, La Tribune, Ouest-France... sur Twitter le #smartpotato a atteint 2,5 millions d’impressions en trois jours. La meilleure opération coût/rentabilité média : "Ca m'a coûté 5 000 $, soit 10 jours de dev pour un développeur freelance moyen. C'est une très bonne carte de visite. J'ai été invité à des conférences. J'ai fait cette opération parce que je recherche aujourd'hui une équipe sympa avec qui travailler. Maintenant, vous me connaissez !"

Pano accéléré : la maison de Jacques Tati

Si la pomme de terre connectée a si bien marché, c'est qu'elle correspond effectivement à un grand axe du salon : connecter tout dans la maison, pour accomplir le rêve de Jacques Tati. La box Enki de Leroy Merlin et Boulanger devient la tour de contrôle des objets connectés à la maison. 17 marques étaient compatibles l’an dernier. En 2020, ce sont 25 partenaires et 400 appareils connectés. “Enki Smart Display” l'interface tactile pour gérer les commandes de Enki, devrait être disponible fin 2020. Alexa d'Amazon rejoint aussi Enki, pour contrôler la domotique via la voix, la tablette tactile ou l'application mobile. L'ambition ? Une “commande universelle” pour tous les objets connectés présents à la maison, quelle que soit leur marque.  

Citons aussi Legrand, spécialiste des infrastructures électriques & numériques, qui signe 2 nouveaux partenariats avec des startups françaises, pour des services connectés et sur-mesure aux clients des hôtels : serrures connectées, majordome virtuel apprenant de leurs goûts et comportements capable d’interagir avec les différents objets connectés via tablette ou voix. Votre majordome virtuel pourra aussi vous commander un Uber ou contacter le roomservice - et de leur côté les gestionnaires auront les informations clés pour gérer la productivité des équipes et la satisfaction clients (maintenance, température, éclairage…).

 

Focus : la perso façon L'Oréal et Delta Airlines   

L'application présentée par L'oréal, qui ne donne pas sa date de commercialisation, ni son prix, détermine les besoins de votre peau et prend en compte les conditions extérieures (humidité, pollution…). Prolongement du teint sur mesure de Lancôme, commercialisé dans les grands magasins parisiens, le dispositif Perso est aussi capable de produire le rouges à lèvre de la couleur de votre choix et le fond de teint adapté à votre peau. Lancement prévu fin 2021, sans idée de la gamme de prix...

De son côté, Delta Airline utilise la techno Misapplied Sciences pour afficher sur le même écran et simultanément jusqu’à 100 messages personnalisés pour les voyageurs. Les écrans divisent la lumière de chaque pixel et envoient des couleurs différentes dans plusieurs directions. Les passagers de Delta Airline voient s'afficher sur les écrans de l’aéroport les informations spécifiques à leur vol. Ce tour de magie est rendu possible grâce à un trackeur de la position des voyageurs via les caméras de surveillance de l'aéroport permettant ainsi de diffuser le message dans leur direction à tout moment. L'aéroport de Detroit devrait inaugurer le dispositif à l’été 2020. Ces écrans nous plongent dans le parcours voyageur du futur, axe principal de la keynote d’Ed Bastian, PDG de Delta Airline. Pour lui, la “réalité parallèle” qui ressemble à de la science fiction “est plus proche de nous que ce que l’on croit. Delta peut utiliser ces messages pour répondre à des questions, avant même que le client ne se les pose”.

Caméra embarquée : la voiture empathique d’Audi

Vous vous souvenez de vos dissertations de philo, "Penser par soi-même" ? Et bien, prochainement, vous aurez ce type de discussion avec votre garagiste. En effet, Audi inaugure au CES 20 un nouveau concept : la voiture "empathique, qui pense par elle-même". Des modèles capables de prendre en compte les émotions, préférences et les conditions pour s’adapter. Si vous êtes stressé, la voiture le sentira grâce aux capteurs de pouls. Elle vous passera de la musique relaxante, adaptera la lumière dans l’habitacle en fonction des lumières extérieures ou activera la fonction massage des sièges. Le projet se nomme AIE pour Audi Intelligence Experience. Le tout, permis par l’intelligence artificielle embarquée dans le véhicule PIA (Personal Intelligence Assistant). 

 

Plan large : la vie privée des assistants vocaux

Le CES, c’est aussi le moment de partager sa vision et son ambition en tant qu’entreprise façonnant le monde… Et si il y a bien un sujet sensible, c’est celui des données et de ce qu’elles deviennent. L’étude récente de Dassault Systèmes révélait que les gens sont prêts à payer davantage pour avoir un service personnalisé. Mais en ayant la transparence sur la finalité de leur utilisation. A Las Vegas, le panel sur la privacy de Facebook et d’Apple est resté au chapitre des déclarations d'intention :  “Chez Facebook nous avons des business model différents de ceux d’Apple, mais nos deux sociétés sont obsédées par la protection de la vie privée” a déclaré Erin Egan, Directrice de la protection des données chez Facebook.
C'est pour cela qu'ont fleuri tout récemment certaines initiatives : la mention “En sait trop” et “Trop personnel” dans les paramètres des publicités qui sont affichées sur Facebook. Et, chez Apple et Google, la fonction
“Oublies ce que je viens de dire” vient d’être ajoutée aux  assistants vocaux…

Dans les différentes innovations présentées par Samsung, deux se détachent, qui modifient les frontières entre l'humain et la machine. Sébastien Bourguignon a testé Neon, de Samsung : "C'est bluffant. On sort de l’avatar un peu kikoolol avec les oreilles de chien et la tête de canard. Cet avatar a une texture de peau et un niveau de détail qui donne l’impression qu’on a un être humain en face de soi". Autre innovation, et véritable star du CES cette année ? Ballie, l’assistant roulant de Samsung est une petite boule. Ballie vous suit à la trace, vous rappelle votre emploi du temps, gère les objets connectés à la maison, ou vous permet de corriger votre position de yoga (c'est vrai, nous n'avons pas d'oeil derrière la tête)… équipée de caméras elle identifie actions et mouvements. Et donne un coup de vieux aux autres. Quand Alexa ou Google Home se cantonnent à une pièce, Ballie a l’avantage du mouvement.



Cyrille de Lasteyrie, humoriste de l'ère connectée, pose la question qui tue, tout en imitant à la perfection la petite boule : "êtes vous prêts à ce que Ballie vous suive jusque dans votre chambre à coucher ?".

Tiphaine Marchioni-Blanco 

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