Qui ?
Jérôme Ruskin, Fondateur et directeur de la publication d’Usbek & Rica.
Quoi ?
Un zoom sur le modèle économique d'un média qui s'engage pour promouvoir une vision positive de l'avenir.
Comment ?
Usbek&Rica, c'est l'histoire d'un Mook (Magazine + Book), vendu d'abord en librairie, avant de devenir un magazine trimestriel, associé à un site et à des événements. C'est aussi une ambition : celle de proposer une vision optimiste du futur, "pour aider à comprendre le monde vers lequel on se dirige, dans le but de construire un avenir meilleur". Jérôme Ruskin, le créateur du titre, désormais à la tête d'une équipe de 21 personnes, explique : "le projet est né en 2008, avant la vague start-up. On a mis deux ans avant de sortir le premier numéro de la revue". Pour convaincre banquiers et investisseurs, ce diplômé de l'EHESS, qui possède 60% de l'entreprise, est passé par un master entrepreneuriat. De quoi bâtir un business plan solide et construire un média rentable depuis 2012, entre abonnements, événementiel, e-commerce et contenu pour des marques et des grands groupes.
En 2016, Usbek & Rica réalise 2 millions d'euros de chiffre d'affaires, dont 35% lié à ses activités grand public (magazine, e-commerce et événementiel). Le reste est réalisé auprès d'entreprises, qui font appel au équipes du titre pour produire du contenu, analyser des tendances, animer des workshop ou créer des conférences. "Nous avons développé du brand content un peu par hasard : fin 2011, des entreprises sont venues nous voir spontanément. Nous avons donc développé une partie 'studio', à la place d'une régie publicitaire." Et ce, sans faire planer de menace sur l'indépendance de la rédaction : "notre ligne éditoriale est compatible avec ce modèle économique : nous ne sommes pas dans le scoop ou la polémique. Notre rapport aux marques a toujours été extrêmement clair, nous avons toujours été authentiques dans notre approche." Depuis 2011, une trentaine d'entreprises ont collaboré avec le "studio", de Danone à EDF, en passant par BNP Paribas Cardif ou la MAIF.
Depuis octobre 2016, le magazine s'est complété d'un site internet, intégrant une fonctionnalité inédite pour les sites médias : "le site repose sur une mécanique de rémunération de l'activité de nos lecteurs" : chaque commentaire, like, partage est récompensé d'un "usbek", convertible en cadeaux. "Nous montrons aux lecteurs que grâce à eux, Usbek&Rica se porte mieux. Nous souhaitons initier une réflexion autour du "digital labour", car nous sommes tous des ouvriers du web, nos actions créent de la valeur pour les grandes plateformes." Le site s'appuie à la fois sur des contributions de la rédaction, de marques ou de lecteurs : elles sont toutes placées sur le même plan d'égalité.
Aux côtés du contenu, Usbek & Rica développe aussi des activités en événementiel et en e-commerce. Ainsi, un "Tribunal pour les générations futures" est organisé chaque trimestre en partenariat avec France Inter, sous la forme d'une conférence-spectacle en forme de procès. Parmi les sujets traités : "Pour ou contre l'immortalité ?", "Faut-il supprimer le droit de vote ?", "Faut-il quitter la Terre ?", "Google Car, selfie stick, Pokemon go : le futur est-il devenu minable ?".
A l'issue d'une campagne de crowdfunding et en association avec des Fablab, Usbek & Rica a aussi développé des "Maker Box", des box cadeaux, pour fabriquer soi-même son skateboard, sa bière, sa chaise ou sa propre imprimante 3D... "La motivation est de faire monter le mouvement "Maker" en France. Nous avons décidé de nous engager pour faire connaitre leur travail et favoriser l'accès à ces lieux. Avec le magazine et les débats, on est dans la réflexion. Là, on entre dans le 'faire'" résume Jérôme Ruskin.
Le "faire" c'est aussi continuer à développer la marque Usbek & Rica, en accroissant son audience, et même, pourquoi pas, en l'exportant à l'international. "Pour l'instant, nous n'avons fait que 1% du travail".
Benoit Zante
