Qui ?
Bertrand Beaudichon et Sébastien Danet, président et vice-président délégué de l'UDECAM, organisateurs des journées de l'UDECAM.
Quoi ?
Les sujets clé de la rentrée débattus lors de la troisième journée du syndicat des agences média, le 5 septembre à la salle Wagram.
Comment ?
1/ La mesure
L'épineuse question de la mesure d'audience est abordée frontalement par Giuseppe de Martino, le secrétaire-général-sniper de de Dailymotion et Alain Crozier, de Microsoft, dans le panel intitulé "la France, frileuse de l'innovation ?" Giuseppe de Martino, qui faisait un peu passager clandestin de l'événement - trusté cette année par les princes US de l'Internet - prédit : "le jour où Médiamétrie s'ouvrira aux dix grands de la tech, les écarts avec nos propres mesures d'audience devraient se réduire"... et la pub digitale suivre - un point de vue qu'il développe dans une tribune sur Slate.fr. Car aujourd'hui, Kantar estime que les annonceurs français investissent 15% de leurs budgets média dans internet, alors qu'aux, USA ce taux est de 20%, 25% en Allemagne 25% et 35% en Grande-Bretagne. Pour Jean-Michel Portier, de Kantar, "il n'y a pas de raison d'être optimiste". Au moins c'est clair, alors que le même événement de l'UDECAM en 2012 s'exerçait à la méthode Coué en combattant la morosité ambiante. Côté Microsoft, Alain Crozier s'étonne de voir qu'Xbox représente 25% de PDM sur les consoles en France - plus que dans les autres pays - mais réalise 10 fois moins de CA que les autres pays sur ce support. Ces nouveaux supports pâtissent évidemment des modes de rémunération actuels, basés sur les pourcentages investis en média, notamment. L'innovation, c'est bon pour les vieux médias ! Le lendemain, en écho, M6 a révélé son offre "MultiReachTV", pour mesurer l'audience globale d'une campagne pub en TV et en Replay, sur ordinateur et IPTV... En attendant le panel multi-écran Google/Médiamétrie.
2/ Les synergies TV/Web
Alors que TF1 vient d'annoncer son partenariat avec Twitter - le premier du genre en Europe - Nonce Paolini vante les mérites de la complémentarité : "le média digital est une chance formidable pour la télévision. Nous allons jouer à fond cette synergie." Dans l'après-midi, Jean-Philippe Maheu, de Twitter, détaille le dispositif Amplify. Aux Etats-Unis, ESPN adresse des tweets ciblés pour élargir son audience, avec des contenus vidéos courts (par exemple, les plus beaux paniers de la NBA), sponsorisés par des annonceurs avec des pré-rolls. Autre technologie made in Twitter, TV Ad Targetting, qui permet aux annonceurs de recibler les spectateurs des programmes dans lesquels ils annoncent, dans les heures qui suivent la diffusion de leurs spots. "Au lieu de prendre des marches à d'autres médias, on veut contribuer à amplifier les autres médias" conclue-t-il. Mark D'Arcy, de Facebook, tente lui aussi d'accrocher le wagon de la TV... mais à défaut de présenter du concret, il nous berce avec ses souvenirs d'enfance, lorsqu'il se précipitait devant son téléviseur pour regarder ses émissions préférées...
3/ Et le client dans tout ça ?
Difficile de prendre du recul sur son marché quand on est centré sur soi... A la fin de la matinée, Richard Girardot, président de Nestlé France, est le premier annonceur à s'exprimer. Et la salle se vide presque à son arrivée. Il s'étonne que le panel précédent - au sujet des modèles publicitaires des médias - n'ait attendu que la dernière minute pour parler des clients, les annonceurs. Dans l'après-midi, Anne-Marie Gaultier, des Galeries Lafayette entend remuer les agences avec un discours très cash : "quand je parle de GRP ou de Share of Voice, ça n'intéresse pas ma direction financière. Ce qu'ils veulent, c'est du CA, du Rex, de l'efficacité... C'est là qu'il va falloir innover, sur la mesure de l'efficacité !". Peu après, Marc Simoncini de Jaina Capital révélait qu'il finançait une start-up sur le sujet. Dominique Kirmann, chez Kraft, est la seule à aborder le vrai seule sujet de la journée : la rémunération. "Pour faire changer les annonceurs il faut changer sa posture. Quand je recois l’agence créa, elle est fière d’elle. Les agences digitales ont la même force de conviction et font rêver. Les agences média ont le leadership sur les chiffres, mais elles n'ont pas assez investi dans des gens capales de simplifier les choses. Qu'elles embauchent ces profils et la rémunération suivra". CQFD.
4/ La convergence agences médias, agences créa
"On va converger, c'est le sens de l'histoire. On fait tous le même métier à un moment donné" affirme Vincent Leclabart fondateur de l'agence Australie et patron de l'AACC. Avec le brand content, les agences médias ont depuis quelques années commencé à empiéter sur les plates-bandes des agences créa... Comment répartir les tâches ? Une piste, avec le cross-over Raphaël de Andreis, passé de BETC à Havas Media France après un passage dans les médias chez Canal + : aux agences médias le "narrative brand content", aux agences de pub les formats plus courts et impactants, portés par des concepts. "On assiste à une mutation du modèle inventé par Procter des "brand platforms campaignable" vers des "brand platforms storyable" (sic). Il est donc logique que les agences médias s'en mêlent. Pas pour tout faire, mais pour apporter leur point de vue." Dominique Kirmann, directrice média et CRM de Kraft Food adopte une démarche consumer centric. "On réunit les partenaires autour de la table sous forme de workshop, guidé par le marketing, le media et les études conso. Sur Carte Noire, on fait du brand content autour du cinéma. Mindshare gère le partenariat avec Allociné, AlloCiné travaille le contenu et ce même contenu alimente Proximity BBDO. Le brand content est l’affaire de toutes les agences".
5/ La Data, small ou Big
Edouard Tetrau, de Mediafin n'hésite pas à mettre les pieds dans le plat en abordant les sujets qui fâchent : "vous vous êtes laissé dépouiller de vos revenus et de votre marché par des acteur de l'internet, qui vous ont pris vos data et vos clients !" Mais les choses bougent : le mega-deal Publicis/Omnicom vise à changer la donne. Havas Media fait lui le pari de l'agilité pour traiter les data. Raphaël de Andreis explique : "le principal défi de la data aujourd'hui, c'est de rendre business friendly la masse volumineuse à disposition. Cela demande des investissements extrêmement lourds et pose la question de la capacité à organiser tout cela." Anne-Marie Gaultier , aux Galeries Lafayette peut suivre 50% de son CA grâce aux cartes de fidélité, ( 70% prochainement) . "Toute est hébergé chez nous. Nous avons 8 clusters différents, on sait exactement ce qu'achète tel type de consommateur, à quelle heure, etc. Désormais, on raisonne avec des plans médias sur clusters, et des dispositifs très différents selon les cibles."
6/ La régulation
Sur un marché en stagnation/récession, chacun se bat pour son fromage, notamment en termes réglementaires. Dans l'un des duels à fleurets mouchetés de la journée, Nicolas de Tavernost, grand bretteur, traite Denis Olivenne du groupe Lagardère de "Ministre de la culture et de la communication", car il ne souhaite pas faire évoluer la réglementation sur les secteurs interdits de télévision, notamment le cinéma. Jean-Charles Decaux ironise sur le "duo infernal" et défend ses colonnes Morris... mais rappelle que la digitalisation de son groupe est en marche, avec 1% du parc mondial converti au numérique. Telle une pythie, Christine Kelly, en charge de ces dossiers au CSA, assure qu'on devrait avoir prochainement "une réponse, ou une non réponse".
Bonus/ La Loi Sapin
Sujets brûlants du moment, les adex, la Loi Sapin et plus généralement, la façon de rémunérer son agence média, étaient absents des discussions sur la scène de la salle Wagram... mais pas dans les couloirs. Seule la ministre a abordé ces sujets dans son discours d'introduction, évoquant la possibilité d'une modification de la Loi Sapin et les consultations en cours sur la compatibilité de la loi actuelle avec les adexchange.
Benoit Zante et Geneviève Petit