Newsletter du Lundi
11/12/23

Paru le

Pourquoi le DSI de Target a demandé… une diminution de son budget

Qui ?
Mike McNamara, EVP et Chief Information and Digital Officer de Target.

Quoi ?
Une présentation sur la transformation menée à un rythme express de l'un des plus gros distributeurs américains, lors de l'édition 2017 de la NRF, à New York.

Comment ?

Nommé à la tête des systèmes d'information du géant américain de la distribution en février 2015, Mike McNamara est arrivé au pire moment, pour jouer les pompiers. A l'époque, l'entreprise se remettait à peine du piratage massif de ses données, en 2014. Mais surtout, Target venait tout juste de tirer un trait sur sa tentative d'implantation au Canada : un fiasco au coût estimé à plus de 7 milliards de dollars, principalement dû à des soucis informatiques et logistiques (ce très long article explique les deux années de cauchemar vécu sur place).

Il se souvient : "Huit semaines après mon arrivée, lors de mon premier conseil d'administration, on m'a demandé ce dont j'avais besoin pour réussir à Target. J'ai répondu 'moins d'argent et moins de gens'". Il estime ainsi que son budget était sur-évalué de plusieurs centaines de millions de dollars...

Un parti pris étonnant, mais qu'il justifie facilement : "Lorsque l'on a trop, on finit par faire des choses qui ne comptent pas vraiment. Et les choses qui comptent finissent par se perdre dans la masse. A l'époque, il y avait 800 projets IT menés au même moment. Aucune entreprise, même la plus grosse, ne peut avoir 800 priorités." Il fallait donc mener moins de projets, mais mieux les exécuter.

Avec cette approche, Mike McNamara estime qu'en dix-huit mois, le cinquième distributeur américain est passé du statut de retardataire – pendant 10 ans, jusqu'en 2011, l'enseigne sous-traitait par exemple son e-commerce à... Amazon – à celui de leader dans le domaine de la technologie, y compris sur le sujet de la cyber-sécurité.

Sa recette se résume en trois règles :
- la priorisation, pour se concentrer sur ce qui compte vraiment pour le business ;
- l'internalisation, pour avoir au sein même de l'entreprise la culture et les ressources technologiques ;
- l'agilité, avec le déploiement de nouvelles méthodes de travail, dans toutes les équipes et pas uniquement pour les équipes informatiques.

Définir les priorités stratégiques n'a pas été une mince affaire : "Lors d'une réunion avec les dirigeants, j'ai demandé à chacun de me lister leurs priorités, en interdisant les slides. J'ai donné à chacun 5 post-it. Quelqu'un m'a demandé de lui donner plutôt le paquet entier... Je n'étais pas la personne la plus populaire de la pièce, mais après deux heures, cela nous a permis de définir toute notre feuille de route de l'année."

Une façon de montrer que les ressources technologiques sont stratégiques pour l'entreprise et ne doivent pas être gaspillées. Car Mike McNamara en est convaincu : "La logistique et la technologie vont être les faiseurs de rois dans la distribution dans les années à venir : elles vont définir les gagnants et les perdants du secteur." Difficile pourtant de transformer d'un coup de baguette magique une organisation conçue pour livrer des containers entiers à des magasins en une structure agile, capable d'envoyer aussi de petits colis directement chez les clients (à ce sujet, lire aussi le cas John Lewis, en Grande-Bretagne)...

"Pour réussir dans le nouveau monde de la distribution, vous devez donc constituer la meilleure équipe technique possible." En 2015, les équipes IT étaient certes pléthoriques – près de 10 000 personnes – mais composées à 70% de sous-traitants. "En 18 mois, nous avons totalement inversé ce ratio. Il y a eu une forte réduction des effectifs et notre productivité a atteint des sommets. Cela nous a permis de faire les investissements nécessaires dans nos infrastructures et notre business." Surtout, "les décisions importantes sont maintenant prises là où elles auraient toujours dû l'être, en interne".

Cette transformation s'accompagne d'un changement de culture, pour développer l'agilité. Mike McNamara combat ainsi le "Old Target Way", qui faisait que chaque projet nécessitait "des heures de conversations, l'implication de beaucoup de personnes et une quête de la perfection." Place désormais à l'itération, au test-and-learn, et au... dojo, un espace au cœur du siège, à Minneapolis, pour développer la formation aux méthodes agiles. Pour favoriser les échanges et casser les silos, les développeurs sont aussi invités à passer 14 semaines par an dans d'autres services de l'entreprise.

Les premiers résultats se font déjà sentir : "nous avons compté moitié moins d'incidents techniques l'année dernière, le site Target.com a traversé la période de Noël sans aucune panne, et dans les magasins, nos outils sont plus stables que jamais. Tout cela en réalisant des centaines de millions de dollars d'économie." Parmi les "success stories" de 2016 : le développement, en partant de zéro, d'un nouvel outil de gestion du réapprovisionnement des magasins par quatre ingénieurs, en seulement huit semaines.

Du côté de la supply chain, les choses évoluent aussi rapidement : 40% des commandes en lignes pour Noël dernier ont été expédiées d'un des 1 800 magasins du groupe, qui deviennent autant d'entrepôts. Un mouvement qui incite le groupe à ouvrir encore davantage de magasins, dans des formats plus petits, au cœur des villes.

Pour 2017, le CTO de Target s'est fixé un nouveauté défi : celui de la diversité, avec l'objectif de recruter 50% de femmes, ingénieures et développeuses. "Ce n'est plus une option, mais une nécessité, pour construire la meilleure équipe possible." L'enseigne soutient ainsi des initiatives comme "Girls Who Code" ou des associations promouvant l'apprentissage du code dès l'école.

L'objectif final : "Devenir à la fois leader dans la distribution et dans la technologie". Ça ne vous rappelle rien ?

Publicite

XX résultats

Oups! votre recherche
n’a donné aucun résultat !