Qui ?
Stéphane Seguin, Chef du département e-business de la direction combustibles et énergies et CEO de Fioulmarket.fr, filiale de Total Marketing Services France.
Quoi ?
Une présentation sur le succès de Fioulmarket.fr, lors des ateliers de la relation client organisés par le Groupe La Poste.
Comment ?
Total est le premier vendeur de fioul en France, à travers six filiales locales. En avril 2012, le marché voit apparaître un nouvel acteur : FioulReduc, un site internet agrégeant les offres de 200 distributeurs de fioul. Six mois plus tard, le groupe pétrolier tient sa riposte : FioulMarket, une filiale à 100% permettant la prise de commande en ligne de fioul. Son lancement n'avait pourtant rien d'une évidence. "Pour les Cassandre, il n'y avait aucun intérêt à développer l'achat de fioul sur internet, la clientèle étant trop âgée pour ce canal. Et ceux qui pensaient que ça allait marcher avaient peur de la cannibalisation" explique Stéphane Seguin. En effet, à quoi bon créer son propre concurrent et dégrader ses marges, sur un marché en déclin ?
Mais quatre ans plus tard, le site compte 500 000 clients, dont 85% de nouveaux et génère 400 000 visites par mois. Avec 35 millions d'euros de Chiffre d'Affaires (et des paniers moyens très élevés), il se place dans les trente premiers e-commerçants français. Le tout avec une croissance de start-up : des ventes en hausse de 70% en 2015 et de 90% sur la première quinzaine de mars 2016. "Ce phénomène d'emballement étonne. Et l'activité inquiète de moins en moins ceux qui craignaient la cannibalisation, car elle a permis l'arrivée de nouveaux clients pour le groupe : nous n'avons pas détruit la marge, nous en avons constitué."
Pour y parvenir, le groupe a raisonné comme les start-up, en répondant à un besoin avant de mettre en avant ses produits ou sa marque. "Sur le site, Total est assez discret. Sauf au moment du paiement, car la marque rassure." Aujourd'hui, Stéphane Seguin s'enorgueillit de faire mieux que son concurrent direct. Sur Google, 85 des 100 requêtes les plus fréquentes pour acheter du fioul pointent en premier vers FioulMarket. Le site produit notamment 4 à 5 articles par semaine sur le prix du fioul. "90% de notre trafic est gratuit. On le doit à mes prédécesseurs qui se sont lancés tôt dans la bataille, aujourd'hui, ce serait beaucoup plus compliqué."
Pour se lancer, le site n'a pas vraiment bénéficié des moyens démesurés de sa maison-mère. "On nous a donné quelques petits millions. Notre actionnaire est dans une démarche de rentabilité rapide, il regarde par dessus notre épaule. Cela nous pousse à être encore plus vertueux dans notre croissance."
Alors que pour les grands groupes, les fonctions informatiques sont souvent considérées comme des charges à externaliser, FioulMarket a souhaité réinternaliser de nombreuses compétences, "Il a fallu expliquer à Total que quand vous travaillez avec des SSII, vous prenez facilement six mois dans la vue et votre concurrent vous double, ce n'était tout simplement pas possible." La filiale de 25 personnes a donc récemment embauché un CTO et des codeurs et s'apprête à avoir ses propres locaux. L'internalisation de l'achat de mots clés lui a déjà fait économiser... 700 000€.
Les agences peuvent toutefois se rassurer : "l'internalisation nous parait fondamentale, mais nous sommes toujours accompagnés par des agences, qui nous mettent au goût du jour et pallient certaines de nos carences dans des domaines spécifiques." Plutôt que les SSII, le site travaille donc avec de petites agences, expertes dans leurs domaines.
"Au début, nous ne représentions rien dans l'activité traditionnelle, mais on commence de plus en plus à prendre du poids, ce qui nous conduit à toucher aux processus classiques des filiales de distribution, notamment sur l'organisation et l'optimisation des tournées." FioulMarket imagine ainsi proposer des prix différenciés en fonction des horaires de livraison, voire des promotions ponctuelles ciblées pour optimiser les tournées. Ce ne serait pas sa première innovation commerciale : le site propose déjà des ventes privées.
Benoit Zante
