Newsletter du Lundi
11/12/23

Paru le

Le faux procès fait à Google

Qui ?
Cyril Rimbaud (@cyroultwit), Pdg de Curiouser, laboratoire d'études et de communication digitale qui aide les marques à comprendre ce qu'elles font sur Internet et ce qu'elles devraient faire avec des études, des formations et des ateliers stratégiques.

Quoi ?
Alors que Google a décidé de privilégier les contenus de son réseau social Google+ dans ses résultats de recherche, Cyril Rimbaud signe une tribune à contre courant sur l’abus de position dominante de Google, à l’heure ou les concurrents ont créé la riposte.

Comment ?
Google a osé associer Google+ à ses résultats de recherche. Monopole, violation de vie privée, etc. Bouh, le méchant Google !
S’il faut retenir 2 choses de cet acharnement blogo-médiatique ce sera :
1- il ne faut plus lire ce genre d’articles qui n’ont d’autre utilité que celle de faire perdre notre temps
2- très peu de papiers ont véritablement parlé des véritables enjeux de la modification de cette recherche Google.

Google est un méchant, il ose faire ce que tout le monde fait
On reproche à Google de créer un écosystème dans lequel le pauvre internaute serait captif. Et ce n’est pas faux. Seulement si je ne suis pas un économiste, j'ai une très bonne mémoire. Et ce que fait Google aujourd’hui n'est pas certainement pas pire que ce qu'ont toujours fait les autres grosses sociétés avec plus ou moins d'impunité.
- 1998, Microsoft, qui jusque-là considérait Internet comme une "petite étape avant les vraies autoroutes de l'information" (Bill Gates, the road ahead 1995) change radicalement de stratégie en intégrant le navigateur MS Internet Explorer par défaut dans le système d'exploitation Windows 98. Cela annoncera la fin de Netscape Navigator et le début des cauchemars des codeurs html. Ce navigateur Internet très médiocre a tout de même atteint 97% des parts de marché des navigateurs jusqu'à 2003. Si c’est pas du client captif ça…
- 2005, Apple, grâce à une excellente politique gratuite à l'origine, a imposé ITunes comme logiciel de lecture sur Mac, puis sur les devices IPod et Iphone. "Imposé" c'est le mot, car vous ne pouvez même pas installer de sonneries personnalisées sur votre téléphone sans iTunes (ou sans jailbreaker le iPhone). Si c’est pas du client captif ça…

Et en France ?
- Free qui nous gave de ses offres mobile depuis deux semaines surgit en splash screen quand vous allumez votre télé câblée. C’est désagréable, mais ils ont le droit, la Freebox est à eux et ce qu'ils mettent dessus aussi, que ça plaise à l'utilisateur ou pas.
- Regardons du côté des "pages d'accueil" brandées Orange, Bouygues et SFR, installées par défaut sur des navigateurs propriétaires souvent indéblocables sans de bonnes connaissances informatiques. Et la mamie du Cantal qui croit qu'Orange c'est le moteur de recherche de l'Internet du web...
- Au fait, qui diminue votre débit sur quand vous surfez sur Youtube pour vous faire préférer Dailymotion ? Vous êtes client, vous leur appartenez…
- Et dans la vie « réelle », EDF et GDF vous imposent des installateurs (ERDF, GRDF) chers, obligatoires et pas toujours compétents ? Non vous n'aurez pas le droit d'en changer…
Ces quelques exemples nous montrent bien que les entreprises n’ont aucun scrupule à utiliser leur situation de monopole pour vendre des services ou générer des revenus supplémentaires. Alors oui, Google le fait, en insérant Google+ dans ses résultats. Mais est-il pire qu’un Orange ou un EDF ?

La vraie question des enjeux de la recherche Google de demain
Les débats sur le monopole de Google ne servent donc à rien. Mais il y en a d'autres qu'il faut lire. Ceux qui pose la question indispensable de l'appauvrissement de l'internet. Car cette "socialisation" de la recherche est une nouvelle étape d'un changement radical du web te que nous le connaissons.
- Il y a 10 ans, tout le monde avait les mêmes résultats google quand il tapait un mot clé. Aujourd'hui nos résultats sont pré-triés en fonction de critères plus ou moins personnalisés, à notre insu (les fameuses Filter bubbles). Et qui dit personnalisation des résultats dit appauvrissement. L’internaute perd sa capacité à explorer Internet et gagne un sentiment de sécurité proche de celui qu’il éprouve devant la télévision.
- Il y a 3 ans il n'y avait pas de temps réel dans les SERPS. Il fallait construire son référencement sur plusieurs mois, voire plusieurs années, en attendant les Google dances mensuelles pour le vérifier, et puis continuer à l'optimiser. Aujourd'hui si vous êtes malin, vous pouvez arriver dans les premiers résultats avec un Tweet en quelques heures. Du référencement temps réel, le rêve de tous les influenceurs du monde, qui sont rarement altruistes hélas.
- Et nous voilà aujourd'hui avec une personnalisation ultime des SERPS basée sur notre graphe social. L'époque où vous étiez un petit pionnier dans le far-west du web est définitivement terminée. Nous voilà maintenant à l'époque des colonies. Où vous ramenez avec vous femmes, enfants, réseaux personnels et professionnels, mais aussi vos habitudes, votre culture. Et ce sera au web de s'adapter à vos désirs, vos envies, vos goûts. Et tel un valet obséquieux, Internet va se courber et vous donner ce que VOUS voulez (enfin ce que vous pensez vouloir ; ne vous inquiétez pas, les marques sont là pour vous aider à vous aider à penser).

Nous sommes donc passé en 15 ans d'un Internet qui changeait les gens, les peuples (et même les gouvernements) en un Internet qui changera pour les gens. Changer c'était douloureux, mais ça nous a amené Wikipédia, WikiLeaks, Twitter. Ne pas changer nous a amené un canapé, de la junk food et la télévision. Alors, a-t-on vraiment envie qu'Internet se transforme en télé interactive ? C’est la direction que prend Google. Et c’est ce qu’on peut lui reprocher.

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